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« Parfum exotique » ou l’eau de Cologne de la courtisane (1/2)

Publié le par Eric Bertrand

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Introduction

L’une des idées majeures de Baudelaire, c’est celle des « correspondances » (voir le sonnet du même nom). Les sensations ressenties par le poète ont le pouvoir de l’amener dans un autre système de représentations, une sorte d’au-delà du réel qui a le mérite de le rendre heureux, apaisé pour un temps de la menace du « spleen ». La femme est la principale médiatrice entre ces deux niveaux de la perception, d’où la place privilégiée qu’elle tient dans tout le recueil. Parmi les « muses » de Baudelaire figure la mulâtresse Jeanne Duval à qui il consacre un certain nombre de poèmes érotiques-exotiques (l’un ne va pas sans l’autre). Le sonnet « Parfum exotique » inaugure l’ensemble consacré à la quête de « l’Idéal » par le biais des femmes. Le poème commence comme une scène d’amour, de respiration (aimer les femmes, c’est pour Baudelaire les respirer, voir « le Parfum ») et débouche sur un autre monde, au terme d’une sorte de crescendo qu’on va analyser à travers une lecture linéaire.

 

Quatrain 1 : début anecdotique, cadre privé et intime, la scène est érotique « soir chaud », « sein chaleureux » et se déroule « les yeux fermés ». Deux sensations sont mises à profit dans une sorte de simultanéité en début de vers « Je respire » / « Je vois ». Un paysage exotique remplace aussitôt la partie de la femme qui sert de base, de port au rêve. L’inspiratrice s’efface et ne reparaîtra qu’au vers 9 comme un relai nécessaire à l’éloignement « ton odeur ». L’impression d’euphorie triomphe dés le début (vers 3 et 4) et accompagne ce départ « à toute allure » : c’est un véritable voyage qui commence, le poète a « le vent en poupe » comme le suggère l’amplification des vers unis l’un à l’autre par un système d’enjambement et par un subtil jeu d’assonances croisées : « Je vois se dérouler des rivages heureux / Qu’éblouissent les feux (...) »

Quatrain 2 : la vision s’approfondit et prolonge le quatrain précédent puisque la proposition est toujours dans la dépendance du « Je vois ». Cette vision est liée à la conscience d’un apaisement, d’un bonheur interne : le spectacle qui s’offre dans ce paradis est celui de l’abondance, de la tranquillité et de la santé. On peut penser au jardin d’Eden (le fils de prêtre défroqué qu’est Baudelaire est imprégné du texte de la Bible) : bonheur humain d’avant la Chute, absence d’inquiétude du lendemain. La nature assure la plénitude nourricière (le vers 5 enjambe sur le vers 6 particulièrement bien coupé entre les deux hémistiches) et garantit l’équilibre humain (pointe de nostalgie à travers les portraits de ces hommes au « corps mince et vigoureux » et de ces femmes qui ne trichent pas...)

 

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A
<br /> Et cet Eden, paradis des sens, est une "île paresseuse" ( j'adore la juxtapostion de ces deux mots), un endroit magique où on prend le temps de vivre, où la parsse est une vertu! ( Prenez-en de<br /> la graine Mr Bertrand, l'heure de la paresse est venue...)<br />
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