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art italien

La Locandiera de Goldoni, un cœur diabolique dans une prison dorée (2/5)

Publié le par Eric Bertrand

 

 

 

Aucun d’eux ne résiste longtemps au charme ravageur de la belle Florentine qui constate cependant que seul le Chevalier a décidé de lui résister. Perché sur ses grandes bottes, ce dernier parade et méprise ses voisins aveuglés par une misérable femme « qui leur fait perdre tout leur sang froid ». Sous le cuir du noble voyageur tout en cape et en formules, l’homme semble définitivement endurci : « J’ai toujours pensé que la femme est pour l’homme une insupportable infirmité », ou « j’y ai plusieurs fois songé mais quand je considère que, pour avoir des enfants, il me faudrait supporter une femme, l’envie m’en passe aussitôt ».

Piquée au vif, et, comme « insultée » elle-même par la vigueur des propos, elle se lance le défi de l’humilier, et, par la même occasion, d’être une vengeresse et de « vaincre, abattre et mettre en pièces ces cœurs durs et barbares qui sont nos ennemis à nous autres femmes qui sommes ce que la bonne mère nature a produit de meilleur au monde ». Unité de temps oblige, il ne lui faudra pas plus d’une journée pour en venir à bout et réaliser ses ambitions de conquête ! « Quel est l’homme capable de résister à une femme quand il lui laisse le temps d’user de tout son art. »

 

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La Locandiera de Goldoni, un cœur diabolique dans une prison dorée (1/5)

Publié le par Eric Bertrand

 

 

 

« Une femme adroite »... Ainsi Goldoni désigne-t-il en français sa Mirandoline, aubergiste à Florence. L’écrivain italien, maitrise la langue de Molière et propose cette traduction alors que la pièce reste intitulée « la Locandiera ». Dans l’interprétation qu’en fait Marc Paquien à la Coursive, Dominique Blanc est cette « locandiera ». Adroite, fine, lumineuse dans sa robe jaune soleil, elle trône, dans sa « locanda ». Au lever de rideau, sous l’éclairage à la Watteau, Vermeer ou Fragonard, la tablée qu’elle préside a des airs de radieux tableau. L’hôtesse de la « fête galante » contrôle les entrées et les sorties. Elle illumine, elle rayonne, bien mieux que la prétendue « duchesse Déjanire dal Sole » parce qu’elle a, comme la comédienne au nom abusivement solaire, décidé ouvertement de feindre et de plaire.

L’unité d’action réside en cela : quatre hommes pour une seule femme. Un marquis de la vieille école, marquis de Forlipopoli, héritier du Matamore de la commedia dell’arte, vaniteux et couard, le comte d’Albafiorita, espèce de Mr Jourdain au visage boursouflé et à la bourse gonflée, le Chevalier de Ripafratta, misogyne solitaire et dédaigneux, Fabrizio, le domestique, à qui le défunt père de Mirandoline a confié le destin matrimonial de sa fille.

 

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Lampedusa : on reste en Sicile avec "le Guépard "!

Publié le par Eric Bertrand

J’ai ramené mercredi à Rennes les caméras empruntées par Raphaël à la section « Arts du spectacle »… Désormais, le spectacle est « dans la boite » et nous restons en contact afin de suivre les étapes du montage… En attendant, je publie ce matin un article sur un événement scolaire qui met la Sicile en vedette… Le programme de Terminale L a été révélé pour les années scolaires 2007-2008 et 2008-2009, l’Italie est à l’honneur, d’abord à travers le Vérone (non pas de Laure Manaudou !) mais de Roméo et Juliette de Shakespeare et ensuite à travers la Sicile du Guépard, de Lampedusa, œuvre déjà citée plusieurs fois à propos du Ponton et de ses sources. Beau roman, très « psychologique »… Voici notamment un extrait du roman qui invite le lecteur à réfléchir sur ce « terreau » qui produit « la plante sicilienne ». C’est le Prince Salina, personnage délicat et cultivé qui propose cette analyse au chapitre 4 du roman.
 
« Le sommeil, voilà ce que veulent les Siciliens, et ils haïront toujours celui qui voudra les réveiller, fût-ce pour leur apporter le plus beau des cadeaux (…) Les nouveautés ne nous intéressent que déjà mortes, incapables de créer un quelconque courant de vie. De là cet étrange phénomène : la formation, aujourd’hui, de mythes qui seraient vénérables s’ils étaient vraiment antiques, mais qui sont seulement de sinistres tentatives pour nous replonger dans un passé d’autant plus attirant pour nous qu’il est en réalité mort. (…) Tout le monde chez nous passe par une voluptueuse torpeur. D’ailleurs j’ai dit les Siciliens, je devrais ajouter la Sicile, l’atmosphère, le climat, le paysage sicilien. Ce sont ces forces-là qui ont forgé notre âme, au même titre et plus peut-être que les dominations étrangères et les stupres incongrus : ce paysage qui ignore le juste milieu entre la mollesse lascive et la sécheresse infernale, qui n’est jamais mesquin, banal, prolixe comme il convient au séjour d’êtres rationnels, ce pays qui, à quelques milles de distance, étale l’horreur de Randazzo et la beauté de Taormine, ce climat qui nous inflige six mois de fièvre à 40° (mai, juin, juillet, août, septembre, octobre, six fois 30 jours de soleil vertical sur nos têtes, cet été long et sombre comme un hiver russe, encore plus dur à supporter. Vous ne le savez pas encore, mais on peut dire que chez nous il neige du feu comme sur les villes maudites de la Bible (…)"

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Continuare in Sicilia... col gattopardo !

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Pirandello et le Ponton (2/2)

Publié le par Eric Bertrand

« (…) La municipalité a ouvert un nouveau terrain de camping du côté de Torremuzza…
-          Le cinéma en plein air va bientôt recommencer !…
-          Tu te souviens « Cinema Paradiso » à Cefalù ?…
-          Cefalù !… Pour moi, c’est d’abord la discothèque ! Et la plage !…
-          L’adjoint culturel nous réserve de bons spectacles de théâtre cet été.
-          Il connaît des gens hauts placés à Palerme. Deux pièces de Pirandello sont à l’affiche… »
Extrait du chapitre 2 de la version narrative
 
 
J’ai déjà mis en ligne récemment le plan d’étude de la pièce que je vais suivre dans les classes, mais je rajoute cet article plus particulièrement adressé aux sections littéraires qui réfléchissent pour le bac à un objet d’étude particulier : « écriture et réécriture »… Le Ponton constitue en effet une passerelle pour aller à Pirandello…
 
              Pirandello, auteur sicilien de la fin du XIX°. Peinture d’une société traditionnaliste, marquée par des figures pittoresques (les « Befana sotto le stelle » incarnent cette dimension-là.) Elles inventent des histoires qui renvoient à l’origine. Elles se réfèrent à la tradition des céramiques. Elles tiennent un discours passéiste.
              Impression d’étouffement dans les nouvelles de Pirandello : personnages prisonniers d’un milieu (c’est le cas des jeunes de la pièce qui n’arrivent pas à se libérer des usages et de l’éducation qu’ils ont reçue). Le cadre sicilien (paysage, société) est très présent chez cet auteur considéré comme « naturaliste », héritier de Zola, soucieux de décrire le fonctionnement de la société. Cet aspect est très présent dans le Ponton : nombreuses références au temps, aux paysages, aux usages, aux habitants…
              Enfin, explicitement dans le texte, au moment de l’épilogue, Carolina donne une clé pour le spectateur lorsqu’elle rappelle son retour auprès de la mamma après avoir commis sa « faute »
 
« (…) Carolina : elle sourit, de plus en plus émue. Je revois la scène, le jour de mon retour… C’était comme dans un conte de Pirandello… Il faisait très chaud, le sirocco soufflait… Pour me faire plaisir, elle m’a proposé un plat de polenta pour le dîner et des cédrats de Sicile… Longtemps, je l’ai serrée dans mes bras, puis je suis montée au grenier, j’ai enfilé une vieille jupe et je suis venue l’aider à préparer la polenta… Jamais on n’a travaillé la pâte comme je l’ai travaillée ce jour-là !... Je la tournais, la retournais, la tordais, et la malaxais avec acharnement (…) »
 
            « Les cédrats de Sicile », c’est précisément le titre de l’une des 365 nouvelles de Pirandello, l’histoire malheureuse d’un Sicilien amoureux d’une jeune fille devenue grâce à lui cantatrice et partie à Naples faire carrière…
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Tradizione litteraria a Santo Stefano di Camastra...
 

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Pirandello et le Ponton (1/2)

Publié le par Eric Bertrand

Comme à chaque période de spectacle, je vais entamer, à partir de la semaine prochaine, une série de présentations de la pièce dans les classes, ceci afin de préparer nos élèves à, à la fois respecter le travail de leurs camarades, mais aussi à mieux apprécier le contenu du texte qu’ils vont entendre.
              A la différence des autres années, dans le Ponton, je n’ai pas travaillé aussi profondément dans le sens de la réécriture d’une œuvre connue. Cette démarche de nature pédagogique était, on s’en souvient peut-être, explicite dans le Ceilidh (référence à Macbeth) ou encore dans le Tennessee club (référence à Tennessee), dans le Loft History 2084 (Orwell et Huxley), Jack, on the route again (Kérouac)… L’idée était donc de donner envie aux élèves, par le biais de la pièce, d’aller par eux-mêmes, à la découverte de ces grandes œuvres.
              Avec le Ponton , la référence est beaucoup plus subtile. Il s’agit de Pirandello, auteur sicilien né à Agrigente, célèbre à la fois pour son théâtre et pour ses œuvres de fiction. En outre, Santo Stefano s’enorgueillit du fait que Pirandello ait situé l’une de ses 365 nouvelles au pays de la céramique : « la giara »…
              Je reviens sur l’auteur du célèbre Six personnages en quête d’auteur demain.
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Il tempo del Pirandello...

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