« (…) La scène se déroule au large d’une petite plage, sur un ponton.
Le ponton est matérialisé par une estrade au milieu de la scène.
Une jeune fille y est allongée et se prélasse dans son peignoir.
Gilda : il est à peine huit heures du matin… Qu’on est bien ! Elle se redresse, fixe l’horizon. Ma nouvelle maison est en face, à Torremuzza... Tout là-bas, sur la plage… Elle est blanche. Blanche sous le ciel bleu. Elle est belle ! Une maison de carte postale… Sur la colline, on distingue le village de Santo Stefano di Camastra. Le village de la céramique !... C’est l’été. Au printemps dernier, peu de temps après notre arrivée ici, j’ai demandé à mon père d’installer ce ponton à cinquante mètres de la plage ! J’y suis tous les matins, bien avant tous les autres !… A la vérité, je n’aime pas la populace ! (…) »
Je n’ai pas voulu faire de la littérature trompeuse mais force est de constater… Les lieux réels n’ont pas grand-chose à voir avec le texte de référence. Ce n’est pas un parti-pris de transformation du réel mais tout simplement la volonté de suivre la logique d’une Gilda FERRARI qui ne supporterait pas un tel environnement… La beauté est ailleurs, là où son oeil n’irait pas…
A Torremuzza, pas de ponton, de plage de sable, de villa blanche ou d’allée d’oliviers. Mais de gros galets ronds, des maisons appuyées sur des échafaudages, la vieille voie ferrée et des rails dont la rouille voyage au rythme des tortillards en provenance de Palerme sur les énormes barils, citernes, hangars, bidons d’une usine désaffectée, sous le pont pisseux de la voie ferrée, sur le blanc terni des galets de la plage.
Une femme met une poubelle dans un containeur. Soudain, elle sursaute, deux chats affamés et faméliques sortent du tas de détritus, l’œil fâché. Un clan de chats à élu domicile sur le fond crevé d’une vieille barque isolée sur les galets comme un ponton à la dérive. Mais sur la colline en face, la petite ville de Santo Stefano pointe dans le matin, mauve sous le soleil, et sous le miroir de l’eau, les galets sont devenus bleus. Comme le dit Gilda, contemplant du ponton la colline :
« La musique du grand jour monte de la place du marché et je referme les yeux pour l’écouter. »
Ferrari, Gilda Ferrari... "Quel bolide !"