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art

Julien Clerc Symphonique : « Là tout n’est qu’ordre, calme, luxe et volupté » (1/3)

Publié le par Eric Bertrand

La scène se passe à l’Opéra Garnier. C’est d’abord un piano noir, sobre. Le spectateur s’attend à retrouver cette voix si particulière, ces mélodies, ces mots qui ont toujours créé un univers et qui refont descendre le grand fleuve...C’était il y a combien d’années ? Dix ans ? Vingt ans ? Trente ? « Jivaro song » : 1968 !

             Mais dans le spectacle « Symphonique », il y a décidément quelque chose de nouveau, quelque chose qui prend soudain aux cheveux. Dans un décor propice à la grande tragédie, ou à la grande comédie, c’est le « Songe d’une nuit d’été » qui s’empare du spectateur et qui le fait basculer.

             Après les premières chansons, Julien Clerc quitte le piano et cite une analyse de Charlie Chaplin dans laquelle il parle des artistes... Les écrivains sont muets car ils gardent leurs effets pour les pages de leurs romans, les savants ne peuvent rien dire non plus car ils pétrifient ceux qui les entourent, les peintres jouent parfois les philosophes et par conséquent se trompent de sujet... et en définitive, ce sont les musiciens qui prennent le pouvoir sur le public. « Il n’y a rien de plus facile et de plus émouvant que le spectacle d’un orchestre... »

             Et quand ce spectacle passe la réorchestration des mélodies de Julien Clerc, il se produit en effet un effet de transport, ce transport dont parle Charles Baudelaire » à propos du vertige de la musique...

 

La musique souvent me prend comme une mer !
Vers ma pâle étoile,
Sous un plafond de brume ou dans un vaste éther,
Je mets à la voile;

La poitrine en avant et les poumons gonflés
Comme de la toile
J'escalade le dos des flots amoncelés
Que la nuit me voile (...)

 

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Pigalle et l'éternelle beauté

Publié le par Eric Bertrand

 

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En France et même à l’étranger, on ne peut formuler ces deux syllabes sans esquisser un sourire un peu libertin... Mais qui sait qu’à l’origine, Pigalle était un honnête artiste qui vivait au XVIII° siècle, sculptait des bustes et fréquentait Voltaire.

Certes, il habitait la fameuse rue et occupait le plus clair de son temps en tout bien tout honneur, à mouler des  « bustes », des « reins », des « fesses » et des « cuisses », bref toute une humanité saisie dans le plus simple appareil... Est-ce une raison pour associer définitivement le quartier Pigalle à la débauche et aux affaires de sexe ?

Je propose de ressusciter le souvenir de Pigalle et de le laisser revenir dans sa rue afin de remettre de la Beauté sous le bas-résille et le porte-jarretelle.

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Nolwenn Leroy et les vieux pêcheurs d’Islande (1/2)

Publié le par Eric Bertrand

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Sur la romantique côte armoricaine, dans le « Pêcheur d’Islande » de Pierre Loti, la belle Gaud vient à peine d’épouser Yann qu’elle aime depuis plus de trois ans... Mais, du côté de l’Arcouest, tout en haut de la falaise de granit rose, entre Plouha et Bréhat, pas le temps de chanter « Paimpol et sa falaise »... La mer est une maitresse impitoyable qui ne supporte aucune rivale et le bateau de Yann doit repartir au large.

A la Croix des Veuves, on voit souvent, glissant sur le sentier côtier, des femmes vêtues de noir, portant triskels ou pendentifs sacrés. Elles viennent prier pour le repos des âmes perdues en mer. « O, combien de marins, combien de capitaines, qui sont partis joyeux pour des courses lointaines, dans ce morne horizon se sont évanouis ? »  A moins que ce morne horizon ne leur ait offert une grâce suprême...

Du haut de sa chapelle, à Saint-Cast le Guildo, Sainte Brigitte a, d’après la légende, un jour de tempête, sauvé du naufrage une princesse et ses douze enfants. A la place du bateau, les marins ont vu revenir vers le rivage le curieux équipage d’une cane et de ses douze canetons (vêtus d’un étroit ciré jaune ?) Les Bretons sont pieux et reconnaissants envers ceux qui les protègent. Ils accrochent des ex-voto dans les églises, se lancent dans de longs pèlerinages, chantent dans les pardons et s’adressent à leurs saints... Saint Renan, Saint Corentin, Saint Caradec...(A suivre)

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Article du mois : relecture du « Vieux saltimbanque » de Baudelaire : les livres qui ne jonglent plus...

Publié le par Eric Bertrand

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Au milieu de la fête, des coups de cymbale et des flonflons, isolé de l’autre côté de la rigole et ne rigole pas, tel le vieux saltimbanque de Baudelaire, le vieil écrivain est tassé sur sa chaise. Le visage porte une blessure. Son beau regard est un peu humide, les mains tremblent, le stylo est tombé. La foule des badauds passe : même passivité, flux continu, docile, insatisfait.
                Les livres sont là, au stand, sur un coin de gondole, figés dans le marbre des mots. Il les a pourtant fait danser, tournoyer, sauter sur ses genoux. Ils sont devenus grands, sérieux, puis un jour, rigides, de plus en plus rigides, ils ont fini par tomber, raides.
                Désormais, ils gisent sous la dalle et le vieux saltimbanque les veille encore. Il rumine, palpite sur son siège, se dit que ses livres sont toujours beaux, jamais évanescents. Au contraire, l’encre sur la page blanche réalise le paradoxe de leur « spiritualité ».

 

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Art contemporain : les sources de Yasmina Réza et les questions de goût

Publié le par Eric Bertrand

 

 

Quand on voit la pièce « Art » de Yasmina Résa, on ne peut pas ne pas penser par exemple au fameux « Carré noir sur fond blanc » de Malévitch. Le tableau ne vaut rien, non, ce qui vaut peut-être quelque chose c’est l’idée de tourner en dérision les recherches sur la perspective. C’est cette intention de l’artiste d’aller renverser un système de représentation qui fait autorité. En cela, le support n’est que la base d’un concept. Il est néanmoins une réalisation de l’art dans le sens où l’entend Descartes : la perfection artistique dépasse la perfection du gâteau de cire produit avec tant de finesse par les abeilles parce qu’il est le produit d’une action pensée et méditée.

                Même si je sais cela, je ne puis me résigner à trouver « belle » toute expérimentation du type Malévitch ou Duchamp. Alors, d’où la beauté provient-elle ? Qu’est-ce qui fait que nous trouvions un objet d’art vraiment « beau » et comment se fait-il que Serge proclame que « son Utrios » est « admirable » alors que Marc affirme radicalement qu’il s’agit « d’une merde » ?

                Nous sommes (disent les philosophes) tous dotés de ce même clavier d’organes particulièrement sensibles et devrions par conséquent tous pouvoir réagir de la même façon à un objet d’art... Nous sommes tous dotés de cette même raison capable d’exercer son sens critique et ainsi d’admettre avec Hegel qu’il existe des harmonies dans le monde et que l’esprit qui est dans le monde est capable de les retrouver (comme un mathématicien est capable de percevoir les lignes harmoniques ou une abeille construire son gâteau de cire). Nous sommes tous conscients avec le romantique Kant que le Beau est dans la nature et qu’il nous est possible, à travers cette aspiration au sublime, de nous fondre dans ce beau...

                Et pourtant, lorsque Marc et Serge se querellent au sujet d’un tableau blanc, nous rions car nous nous y reconnaissons. Le snobisme serait-il plus fort que le sens esthétique ?

 

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