La rue de Pernelle et l’hôpital Aufrédy : balades à La Rochelle (4)
Il y a à La Rochelle, du fait de la situation de la cité sur l’Atlantique, de ses ressources en vin et en sel, un passé lié au commerce triangulaire. De grandes fortunes se sont, ici comme à Nantes, édifiées chez les armateurs. C’est le cas de la famille Aufrédy qui , en plein XVIII°, investit dans des navires en partance pour l’Afrique et que Balzac cite dans « Splendeurs et misères des courtisanes ».
Mais à cette époque, la fortune lancée sur la mer reposait en même temps sur une « assiette » bien aléatoire... Ainsi, les Aufrédy, victimes d’un coup du sort, jouent-ils avant l’heure, le scénario inventé par Balzac. Splendeur et puis misère... Misère absolue, au point qu’ils ne doivent leur survie qu’aux religieuses dont on a vu la présence si marquée place Royale à La Rochelle...
J’employais à dessein à leur propos le terme « d’assiette » et je songeais à l’analyse de Montaigne... « Le monde est une branloire pérenne », à Hamlet qui se sent « enfermé dans une coquille de noix ». C’est l’héritage baroque de ces maîtres qui nous disent, du haut de leur XVI° siècle, que rien n’est assuré sur cette pauvre planète où, bon an, mal an, nous conduisons, les uns et les autres, notre frêle destin.
Les Aufrédy ont eu le temps de songer à cela... « vanitas, vanitatis », les fortunes sont au gré des flots... Mais un jour, miracle, les navires qu’on croyait engloutis reviennent au port. Shakespeare invente le même incroyable scénario dans le dénouement du « Marchand de Venise ». Mais entre temps, les consciences ont été marquées, les esprits ont mûri, médité, et par reconnaissance, l’épouse Aufrédy, la dite « Pernelle », a fondé l’hôpital du même nom.