Rue le Saphir : Balades à La Rochelle (32)
Les bateaux quittent le port de La Rochelle et s’en vont sur le vaste océan pour des missions qui ne sont pas toujours heureuses. Avec le développement économique du pays, la ville s’est engagée dans le commerce de « bois d’ébène », c’est ainsi qu’on désignait le trafic d’esclaves par exemple entre les côtes africaines et Saint-Domingue pour cette goélette nommée « le Saphir" et dont on trouve un ex-voto dans la cathédrale Saint-Louis.
Trafic juteux comme chacun sait et qui impliquait côté occidental, un stock de pacotilles à échanger... C’est dans ce sens qu’il faut lire la « chute » de la chanson interprétée par Julien Clerc, extrait du long poème « l’Horizon chimérique » de Jean de la Ville de Mirmont. Ce dernier, ami de François Mauriac, a connu un destin tragique aux champs d’honneur, frappé par un obus sur le Chemin des Dames.
Je me suis embarqué sur un vaisseau qui danse
Et roule bord sur bord et tangue et se balance.
Mes pieds ont oublié la terre et ses chemins ;
Les vagues souples m’ont appris d’autres cadences
Plus belles que le rythme las des chants humains.
À vivre parmi vous, hélas ! avais-je une âme ?
Mes frères, j’ai souffert sur tous vos continents.
Je ne veux que la mer, je ne veux que le vent
Pour me bercer, comme un enfant, au creux des lames.
Hors du port qui n’est plus qu’une image effacée,
Les larmes du départ ne brûlent plus mes yeux.
Je ne me souviens pas de mes derniers adieux...
Ô ma peine, ma peine, où vous ai-je laissée?
Voilà ! Je suis parti plus loin que les Antilles,
Vers des pays nouveaux, lumineux et subtils.
Je n’emporte avec moi, pour toute pacotille,
Que mon cœur... Mais les sauvages, en voudront-ils ?