Rendez-vous ce mardi matin avec Donald Farmer,
le metteur en scène de la troupe d’acteurs de Wick. Ils ont acquis une réputation nationale puisqu’ils viennent de remporter le
trophée de la meilleure trompe d’amateurs du pays. C’est Rena qui m’a demandé de rendre visite à cette personnalité locale que je n’avais jusqu’alors jamais rencontrée (et c’est pourtant lui qui,
naguère, m’avait donné
le mythique vélo avec lequel j’ai sillonné les chemins écossais. Il s’agissait du vélo de sa mère).
Donald a monté beaucoup de spectacles et notamment du Molière. Il m’avoue avoir envie de lire le Ceilidh même
s’il ne comprend pas un mot de français. Cependant, il en connaît la trame, grâce à Rena qui lui a rapporté les principales clés de l’intrigue. Lui aussi en vient à l’idée qu’il serait bien
intéressant de monter une telle pièce à Wick. Sait-on jamais ! Rena, chez qui nous
terminons la soirée, a toujours cet air de mijoter quelque chose. Elle a toujours aimé réservé des surprises et ne pas trop en dire : elle me demande cinq livres mais ne me dit pas pour qui
elle les réserve. Elle parle du colossal travail de traduction de la pièce, colossal pour une personne seule, mais elle ajoute : «There is somebody else… ». On n’en
saura pas plus…
Dans cette région où chacun des noms de lieu évoque une réalité précise : Orkney, Baie des Sinclair, Girnigoe
castle, Ackergill Tower… chaque mot, chaque allusion renvoie à une représentation particulière. Prenons par exemple le voyage en du train tel que l’évoque la sorcière :
« Diana : (S’allongeant à même le sol comme sur la banquette d’un wagon. Long soupir) Dans le Londres-Edimbourg, j’ai trompé l’ennui, huit heures
d’affilée !... Et dans le Edimbourg-Inverness, cinq heures d’affilée, la banquette chavirait et me donnait la nausée…Et dans le Inverness-Wick, cinq heures d’affilée, la tête comme un cargo
dans une marée noire… Bouh !... Je me suis réveillée dans le coaltar ou dans les nues !... »
Ce passage comporte un fonds de plaisanterie locale sur la lenteur du train que seuls un autochtone
peut apprécier). Sans parler du pub du Black Cat qui n’existe pas à Wick et qui produit sur le spectateur originaire de cette ville un effet qu’il ne crée pas chez le spectateur français. Autant
d’éléments que le linguiste appellerait « indices contextuels » et qui interviennent dans la réception d’un message aussi particulier que le message théâtral.
The old Sinclair Girnigoe in Noss Head library...