Pendant que cause l’entreprenante Gilda, Salvatore ne peut s’empêcher de pouffer de rire. On travaille sur la façon dont il faut
« déployer » le rire sur la scène. Puiser l’énergie dans le ventre et faire éclater le son de toute la poitrine. C’est bien l’expression « à gorge déployée »
qui convient.
Salvatore n’en peut plus, tant pis ! Il sort de sa
cachette pour s’esclaffer et venir entraîner le public par un bon fou rire communicatif. Cela doit se jouer comme un aparté, un moment de grâce sous le regard consterné des autres
qui adoptent des attitudes variées.
C’est lorqu’il parodie le discours des
amants par des racourcis sacrilèges qu’il aggrave son cas. Il revient auprès du groupe des « embusquées » pour essayer de partager son rire mais il ne trouve que réprobation et
ses éclats se brisent quand il affronte le regard d’Ornella. Non seulement il a interrompu l’échange amoureux, mais en plus, il s’est couvert de ridicule car il n’a pas compris
qu’Ornella l’identifiait à Gigi… Cet aspect là est très sensible dans le récit et j’y reviens demain à travers l’évocation de la scène en contrepoint.
« Gilda : comme on est bien là tous les deux,
Gigi !... La griffure des feuilles d’olivier sur les épaules et la rumeur caressante de la mer… Parle-moi, Gigi, souffle moi tes mots, j’aime entendre ta voix comme un léger sirocco sur ma
joue, sur ma taille et sur ma cuisse.
Gigi : tu as la peau douce Gilda. Il y a du sel sur tes
lèvres. Ton corps est onduleux comme les vagues… Je suis déjà loin sur la mer, bien au-delà du ponton, tout au large… Je ne vois plus les lumières de Santo Stefano. Je n’ai que l’éclat de tes
yeux pour me guider…
Les autres se retiennent pour ne pas rire. Tiziana et Lauredana sont obligées d’entraîner Salvatore à distance pour éclater
de rire. Seule Ornella garde son sérieux)
Salvatore : (mimant son
compagnon) : « tu as la peau douce Gilda ! Du sel sur les lèvres et des vagues sur le corps ! Je suis loin du ponton ! Tes yeux
sont des phares !… » Et l’autre ! « La mer, la brise, le sirocco… Oh, c’est trop drôle ! »
Sul mare, andare lontano...
Rubrique Goncourt :
Lecture des Bienveillantes (7/7)
La fin du roman est plongée dans la confusion de la débâcle. Tout échappe à la
volonté de l’ordre et de l’organisation. A nouveau blessé et diminué par ses troubles organiques, Max rentre à Berlin où il est soigné par Hélène, mais il ne donne pas de suite à la relation.
Il cherche dans la maison de sa sœur le fantôme perdu et se livre à des rituels hallucinés.
C’est Thomas qui vient le chercher pour l’entraîner dans de dernières péripéties à
travers un territoire pénétré par l’armée russe. Et toujours les figures des deux policiers qui le poursuivent et qui acquièrent véritablement le statut de « mouches », (p759) :
il finit par les abattre l’un et l’autre, comme il exécute froidement l’un de ses anciens amants et même son ami Thomas. Le roman s’achève sur ces dérapages, au milieu du sang et de la
confusion et sur le mot « bienveillantes » qui matérialisent les tourments d’un être qui a perdu tout repère.
Réaction de collègue :
Les lectures avancent et dans la classe de 1ère L de
34 élèves le nombre de livres lus est très variable : quelques-uns : 3/4
livres , la majorité entre 6 et 8, quelques lecteurs plus confirmés
s'acheminent vers une lecture de la totalité de la sélection. Ils ont
l'intention de poursuivre activement pendant les congés et éliront leur
délégué le lundi 6 novembre. Pour l'instant ont la faveur des lecteurs,
Miano, Schneider, Laurens, Nothomb, Boulin, Vallejo. Les deux échanges
entre le lycée de Bruz et de Rennes ont été riches d'argumentation.
Un débat très intéressant autour des Bienveillantes a montré l'intérêt
que les élèves portaient au sujet traité : mais pour l'instant ceux
qui le lisent avancent doucement dans ces 900 pages.