Les fleurs bleues dans le sable mouillé, hommage à Christophe
C’était en pleine période yéyé et on l’imaginait, jeune homme un peu vain, qui avait, avec les filles, un succès fou, qui « se prenait pour Ben Hur en conduisant d’une main », poursuivant le doux visage d’une Aline en bikini. Plages de sables, « dolce vita » et amours grenadines chantés jusqu’à l’été indien.
Mais il est revenu, plus étrange, nimbé de mystère avec ses lunettes fumées bleues, ses bottes blanches et ses airs de dandy. Se décrivant lui-même dans un gilet de satin, ou smoking blanc cassé. « Il est six heures au clocher de l’église, dans le square, les fleurs poétisent ». La plage n’est plus qu’un square, un bassin d’expérimentation des mots et des notes bleues. La voix semble sortie tout droit d’un conte de Théophile Gautier ou d’Edgar Poe.
Décidément, il a plu sur la plage du disque. « Dans sa veste de soie rose, il déambule morose, le crépuscule est grandiose ». Il s’éloigne et revient doucement d’une sorte de paradis perdu qui le hante. La musique est lente, presque funèbre. Elle accompagne et invite la silhouette d’une créature évanescente, peut-être une petite fille du soleil. Celle-là ne laisse pas d’empreintes sur le sable. Mais « dans ce luxe qui s’effondre », il recueille ses mots et la note bleue d’une fleur de clavier mouillée dans l’orage.