« En lisant, en écrivant »… (Dosette de lecture n°17) Nabokov : « Lolita »
« Des gambades coruscantes », « une eurythmie si particulière », « un regard adamantin », « des yeux smaragdins »… Il semble que le narrateur de « Lolita » ne trouve pas suffisamment de mots, ni de hauteur pour définir le charme de « sa nymphette », celle que Proust appelle « la jeune fille en fleurs » et Vian « la bobby soxer ».
Lolita est pour Nabokov une projection littéraire, une chimère dans laquelle il amalgame la pâte du langage et le feu d’une mélancolie profonde. Son héros Humbert Humbert a aimé dans son adolescence une fille de son âge qui ressemblait à Lolita et il l’a perdue tragiquement. À quarante ans passés, il explique au juge qu’il n’est pas un monstre mais une sorte de pathétique « ver de terre amoureux d’une étoile ». Pour retrouver « le vert paradis de ses amours enfantines », il est prêt à tout, « reste clapi dans l’obscurité » et se vautre dans la fange en y entraînant « la rose qui découvre qu’elle est une machine de guerre » comme l’écrit Hugo à propos de « la petite Cosette ».
Quel vertigineux abîme pour un écrivain de l’âme humaine.