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Tristan et Iseut : dosette de lecture n°84 La passion dans les veines

Publié le par Eric Bertrand

Quelle leçon d’amour l’histoire de Tristan et Iseut nous donne-t-elle ? Que nous dit-elle sur la société et sur la passion ?

Parmi tous les noms qui émergent presque spontanément du « maquis » arthurien figurent ceux du chevalier Tristan et de son indissociable Iseut. Tristan fait partie de ces hommes valeureux, désintéressés par la vie et capables de s’oublier par désespoir. Il a toutes les qualités du chevalier errant et cette tristesse prédestinée qui le met un jour au contact de la magicienne Iseut la Blonde, originaire d’Irlande. Mais au lieu de céder à ses pulsions il a, comme les autres, une quête supérieure à accomplir au nom de son roi.

Pourtant, même quand on s’appelle Tristan, comment ne pas succomber à la tentation et se laisser aller à la nature ? Tristan et Iseut sont beaux, jeunes et pleins de talents, ils sont attirés irrésistiblement l’un vers l’autre et malgré tout, cela ne suffit pas pour les dévoyer : en effet, Iseut doit devenir reine et Tristan doit tenir son engagement. Alors, il faut qu’intervienne la magie… Sur le bateau du retour vers la France, les deux amants boivent « un vin herbé » un jour de canicule. Il en va ainsi des amours d’été… Alors les cœurs se bouleversent, les corps se lâchent, la passion s’abat, et plus rien n’arrête ni la fougue ni l’audace. Les deux élus oublient instantanément tous leurs serments : ils s’enlacent et se tordent et ils s’aiment contre le Roi, contre la société, contre le monde, quitte à tricher, à se cacher, à user du mensonge et de la ruse…

La blonde Iseut est devenue soudain une femme libre et exigeante qui se moque des principes et des usages. Bien mieux encore que ce cannabis de vin herbé, son charme à l’épiderme fait éclater les limites du devoir, de la sublimation ou de la chimérique spiritualité. L’étreinte est nécessaire. Le vin herbé coule dans les veines en circuit fermé et ceux qui y ont goûté foncent obstinément l’un vers l’autre, et plus rien ni personne ne parvient à les séparer. Pour en apprécier l’impact, il faut relire La fable du chèvrefeuille et du coudrier que raconte une autre poétesse amoureuse, Marie de France, dans son Lai du chèvrefeuille : elle y explique que les deux amants sont comme le noisetier autour duquel s’enroule le chèvrefeuille. Si on cherche à les séparer, on les condamne.  Comme le confie Tristan :

« Belle amie, ainsi en va-t-il de nous,

Ni vous sans moi, ni moi sans vous ».

Tristan et Iseut : dosette de lecture n°84 La passion dans les veines
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