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Une scène répétée sous le ciel de Rome

Publié le par Eric Bertrand

Grands oiseaux de présage, les avions passent au cœur des fumées de Fiumicino et, dans le mouvement d’horlogerie mal réglé des trottinettes, vespas et Fiat 500 tout feux rouges allumés, parmi les ruines et les bâtiments antiques, comme un Vésuve au-dessus de la ville éternelle, le Temps enfume les vivants.

Sous ce tremblement des heures, parmi les magnolias où courent les vertes perruches, éclairs vifs sous les palmiers en lampadaires, ces acteurs éphémères jouent leur scène entre les toits embrasés de Trastevere et la Place dorée del Popolo. Et les statues muettes et blanches baissent les yeux sous le soleil d’Apollon tandis qu’avancent les Vénus aux jambes nues, aux robes ouvertes et légères, les femmes aux visages peints, blafards sous le fard. À coups de pinceaux, les faux-cils, les breloques, les perles et les tatouages essaient, sur la toile de la peau et du papyrus brun, des vaguelettes d’écriture. Et la toile bouge jusque dans les fontaines où les Tritons pleurent toutes les larmes d’eau. Sur leurs écrans, les hommes tuent le temps, de leurs grands ongles, les filles effleurent les touches des portables et font semblant d’ignorer les touches et les œillades.

Et le Temps glisse, réfléchit les miroirs, les silhouettes, les yeux ravis, éplorés comme les figures sur les tableaux des musées, des galeries dans les palazzi, les villas. Les odeurs moulues du café, les parfums de glace fondue, l’émiettement de la pâte à pizza à la bouche des serveurs, le « sfumato » du cappuccino, moustache de chocolat sur les lèvres montent vers les nuages ou retombent sous la terre.

Tout au long des quais, le Tibre creuse la pierre et inscrit dans la durée cette minute d’existence au fil d’or de la ville éternelle.

Rome

Rome

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