Armstrong sonne de l’olifant... (2/3)
Dans l’arène surchauffée, alors que les autres héros tentent parfois un assaut, parviennent un instant à briller puis s’effondrent, lui, en jaune jusqu’au fond des os, le visage appliqué, l’œil d’acier, imperturbable, sort le glaive et inscrit sa victoire. Des chapitres entiers, des fragments d’épopée qu’un Roland Barthes, au seuil des années 2000, aurait sans doute intitulés « Nouvelles mythologies »... Silhouette en bouclier contre les assauts de la route et de ses adversaires, Armstrong est un travailleur forcené, un professionnel dans le sang. Il calcule la victoire, l’analyse avec la précision d’un ordinateur, avertit son « staff » puis met en route cette époustouflante machine à gagner, fait rendre les armes aux plus tenaces de ses adversaires et agace ou éblouit le spectateur.
Mais le dernier grand champion du Tour, sans le savoir, roulait sous les pignons d’une machine à broyer les rêves, à laminer l’épopée. Fin d’été 2012 : « Armstrong, c’est fini ! » Il est temps de mettre un terme à tous les mensonges ! Quitte à faire tomber tous les étendards qui flottaient au bout de l’horizon. Depuis quelques années, le Tour passe sous les fourches caudines du contrôle absolu. L’esprit a changé, il faut être « pur encolure et pur sang ». On entre dans l’ère exsangue de la transparence. Les nouveaux héros seront irréprochables ou ne seront pas !
Pas plus que le tour 2011, le tour 2012 ne m’a convaincu... Attendons le chevalier Ajax qui franchira la ligne lavé de tout soupçon et qui pourra saluer la sceptique petite foule des admirateurs sans être suspecté de tricherie. Attendons celui qui saura redonner du rêve, sans pour autant que la meute des détracteurs ne vienne renifler le produit dopant dernier cri... Le spectateur a perdu sa force d’enthousiasme. Le pneu est crevé, il roule désormais à plat derrière les vainqueurs des grands tours. « Untel a gagné... Il est sans doute mieux dopé que les autres ! »