"Un bon bifteck" pour un Rocky en bout de course
Ce n’est pas une surprise pour qui connaît un peu l’œuvre de Jack London, le muscle et le poing ponctuent les récits et leur donnent sa « respiration »… Dans le cadre d’une réflexion sur la boxe que je prépare pour l’année scolaire, je relisais la palpitante nouvelle intitulée « un bon bifteck » extraite du recueil « Dieu ricane ».
Elle raconte le dernier combat de Tom King, vieux boxeur affamé et contraint de relever le défi d’un combat contre un jeune, Sandel, étoile montante de la boxe. Avec une grande maîtrise, l’écrivain raconte en détails le combat qui se déroule sur une durée de onze rounds. Il renseigne le lecteur sur les coups portés, sur l’ambiance autour du ring et sur l’évolution du combat. Bien évidemment, le jeune lion porte des coups redoublés à son adversaire et ce dernier encaisse sans pratiquement réagir dans les quinze premières minutes.
A la vérité, il laisse « passer l’orage » et compte sur son expérience et sur son sens de l’économie pour « durer » et rapporter la mise : une somme qui lui permettra d’acheter son bifteck (car depuis qu'il ne boxe plus, il crève de faim...) Au-delà du tourbillon du combat qui finit par osciller au fur et à mesure que les minutes passent et que l’équilibre entre les forces semble revenir, Jack London offre au lecteur une véritable méditation sur les forces de vie et les forces de mort. Il oppose de façon très allégorique le corps de la Jeunesse au corps de la Vieillesse et il évalue ce qui permet à l’homme de ne pas s’avouer vaincu et de résister au temps qui passe. Le véritable adversaire de Tom c’est le Temps et le bifteck en arrière-fond fournit l’image insaisissable, évanescente d’une nourriture de Jouvence !