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Le retour de Gainsbourg

Publié le par Eric Bertrand

              Cela n’a, apparemment, aucun rapport avec l’Ecosse mais j’expliquerai demain et après demain pourquoi Gainsbourg est profondément associé à l’Ecosse et à mon travail d’écriture. Par ailleurs, ce blog se veut aussi décryptage des projets littéraires en cours et à venir, et, dans cette optique, je dois noter que j’ai entrepris la semaine dernière une manœuvre qui consiste à rentrer en contact avec les ayants-droit de l’artiste. Je viens enfin de trouver un moyen (fiable) pour leur faire parvenir le texte de l’Homme à la tête de chou et au cœur d’artichaut. J’avais laissé dormir dans un tiroir ce texte que j’apprécie beaucoup et puis, réveillé par cette période de commémoration de la mort de Gainsbourg où beaucoup d’émissions, d’articles et d’ouvrages sont dédiés au maître, je viens de l’exhumer via la SACEM… Je m’explique…
              L’histoire de l’atelier d’expression artistique du lycée est marquée par le spectacle monté en 2002 sur Gainsbourg : me nourrissant de cette œuvre que je connais bien et que je sais traversée par des courants anglo-américains (Lewis Caroll, Nabokov, le film « Bonnie and Clyde » de William Penn …) j’ai écrit « l’Homme à la tête de chou et au cœur d’artichaut »… Mon objectif : imaginer un scénario qui puisse intégrer le maximum de références à Serge. Cela va des premiers textes aux derniers, composés notamment pour Jane Birkin. A l’époque de la création de la pièce sur la scène du Palais des Congrès, intégrer des claquettes et des références à l’anglais ne posait aucune difficulté, bien au contraire… Il y a dans Gainsbourg un rythme particulier en même temps qu’une poésie et un sens dramatique qui conviennent particulièrement bien à la scène … Le problème auquel je me suis heurté en 2002, c’est celui des droits d’auteur, d’où le rejet de toute possibilité d’édition… Des infos sont disponibles sur le site pour ceux qui veulent en savoir un peu plus mais pour ne pas m’égarer, je reviens demain à mon propos : Gainsbourg et l’Ecosse…

Rue de Verneuil

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Texte en gaélique spécialement pour la scène

Publié le par Eric Bertrand

                 Si j'ai tenu dans le Ceilidh à imaginer un personnage marqué par la culture gaélique, c'est que j'associe profondément mon expérience de l'Écosse à la langue gaélique. Je l'ai apprise d'abord à l'université d'Aberdeen, avec un maître, et puis régulièrement par la suite, avec un manuel, afin de garder une pratique. Ce qui m'attire dans cette langue, outre son intérêt linguistique et civilisationnel, c’est le son qu'elle produit. J'aime articuler tout particulièrement certains mots à haute voix (ce qui fait bien rire mon fils qui a six ans !), et c'est en fonction de ces mots que j'ai écrit le petit texte suivant que je dirai donc sur la scène au moment du spectacle.
 
Chi mi’n tir son robh mi nam bhalach. Is toigh leam a bhith à dol dhon mhonach ans an’Alba, ann’s a mhadainn. Agus is leam a bhith a coiseacdh faisg air a cnoc, agus an allt. Agus a griadnach, cola ris deoch uisce. Ha mi a’smoniaradh gum bi graianach ans a phocaid a huile bha
 
              Ce qui donne à peu près :
« Je retrouve le pays de mon enfance au-dessus de la ligne d’horizon. J'aime aller dans la lande le matin en Écosse. J'aime aussi marcher près des collines et des ruisseaux. J'aime randonner sous le soleil, avec ma gourde. Je pense que de cette façon, pour toute la journée, je me mets le soleil dans la poche ! »
              Quant au son que cela produit, je vous donne rendez-vous les 30 mai et 2 juin prochains !
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West coast, the gaelic area (collection personnelle)

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Le kilt sur la scène

Publié le par Eric Bertrand

Après ce détour par la réalité des répétitions, je reviens à des épisodes liés à l’Ecosse. Je le rappelle, dans ce blog, j’essaie de tenir le cap : ne pas raconter ma vie mais indiquer par quel fil je suis arrivé à produire le texte du Ceilidh et sa réalisation scénique… Et on voit que la pelote de laine n’est pas facile à débrouiller ! En tout cas, les articles qui précèdent sont là pour indiquer que le kilt a bien sa place sur la scène et j'espère avoir montré que ce n'est pas une coquetterie !
              Le personnage de Sheumas était tout indiqué pour porter le kilt… On se souvient peut-être qu’au départ, je devais incarner ce personnage, parce que je l'imaginais plus âgé que les autres et puis parce que je me sentais proche de lui (non pas de son côté machiavélique, mais de son côté écossais !). Pour des raisons de distribution, j'ai finalement confié le rôle à Ronan et je ne le regrette pas.
              Le problème est qu'il ne possède pas de kilt sur mesure… J'ai donc trouvé une solution qui est de lui faire porter une cravate au tartan des Mac Leod. En qualité d'animateur figurant dans la soirée du ceilidh, j'apparaîtrai avec le kilt, d'abord pour dire un texte en gaélique puis pour m'adresser à Sheumas qui introduira Ronald et les autres. Mon intervention sera précédée par un ballet de claquettes irlandaises (sur un air traditionnel de Run Rig) et il est tout naturel que je dise un poème en langue gaélique comme cela se fait en général : retenons ce que dit Ronald au moment où il se présente au public du pub :
 
« Ronald : (Très suffisant) Bonsoir. Merci ! Traditionnellement dans un ceilidh, si on est musicien, on propose un morceau de musique, un poème en langue gaélique sur un air de harpe… Moi, je ne suis pas musicien, je ne suis pas poète non plus, je suis un homme de théâtre… »
 
              Le texte qui est dans le livre n'est pas celui que je dirai sur scène. J’en rappelle le contenu, avec sa traduction :
 
« Chi mi’n tir son robh mi ‘nam bhalach. Bhar a chruinn, Leaca Li’nam shealladh. Chi mi’n tir son robh mi nam bhalach... Is chord e rium a bhith a coiseachadh air na duthaid a measg nan caistead tuiteam agus manaidhean agus craiantan. Is e aite sin far a choinnich esehdraidh agus sgeulachdan le an laithean seo.”
« Je retrouve le pays de mon enfance au-dessus de la ligne d’horizon, tout autour de moi. J’aime tant me retrouver dans ce paysage de ruines et de landes et d’océan. C’est l’endroit où l’histoire et les légendes se mêlent au temps présent »
 
              Ce texte n'est pas facile à dire sur scène, j'ai donc décidé d'en écrire un beaucoup plus sonore et théâtral, je le livre demain dans le prochain article. En attendant, je cède à la pression de certains d’entre vous et vous rends une petite visite en kilt !
In the moorland near Achavanish : "anns a mhonaidh" (collection personnelle)

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Pudeur des comédiens

Publié le par Eric Bertrand

            Dernier article lié à la répétition de mercredi (j’en profite pour signaler aux acteurs lecteurs de ce blog que la répétition générale au Moulin à Sons n’aura pas lieu à partir de 16h00 comme initialement prévu, mais à partir de 13h30) .Article consacré à la pudeur des comédiens qu’il faut parvenir à surmonter pour mieux jouer les personnages… Il y a deux couples d’amants dans la pièce. Et deux couples d’amants de tragédie, forcément marqués par ce que les pompeux appellent « hybris » et ce que le spectateur identifie comme passion. Cette passion est un ingrédient nécessaire au grain de la tragédie et dans le Ceilidh, le personnage le plus passionné est celui de Rebecca. Rebecca « aime » dans la démesure… Beaucoup plus que Heather… Elle ressemble davantage à cette héroïne de la légende que joue sa rivale : la princesse Fiona.
              Dans l’échelle passionnelle, on aurait au sommet Rebecca et Fiona dans des registres différents (amour torturé chez Rebecca, amour partagé mais impossible chez Fiona) et, nettement au-dessous, Heather, midinette instable, amoureuse « volatile » (comme disent les sorcières) qui cherche à oublier une déception amoureuse et à calquer son comportement sur le modèle romanesque de son personnage…
              Or, cette passion, ce vertige amoureux doit passer sur la scène par une gestuelle : lèvres, caresses, mains, corps, étreintes… Et il est difficile de demander cela à des adolescents. Ils sont, dans la majorité, en seconde… Ils ne se connaissent pas forcément bien, ils ont une immense pudeur. Jusqu’à l’année dernière, les comédiens formaient un groupe de copains et de copines vraiment proches les uns des autres, de sorte que je pouvais leur demander n’importe quoi… Je me souviens par exemple d’une scène particulièrement torride sur la table d’un bistrot entre les deux « lofteurs indécents » du Loft History 2084 : Tarzan et Fleurette… L’objectif déclaré de ces personnages montrés du doigt comme obscènes et dangereux par le spectacle de la télé réalité était clairement de défier « Big Brother », de combattre l’obsession puritaine et sanitaire et d’imposer l’amour par le biais des caresses …
              Sans aller jusqu’à l’indécence, cela n’est pas le but dans ce texte d’un genre tellement différent, je demande aux comédiens concernés de se libérer… Par exemple, je propose à Sélouane de tenter de séduire à nouveau sa maîtresse en colère en ayant recours non seulement aux beaux discours mais aussi aux caresses… Il doit toucher sa peau du bout des doigts, lui tordre les cheveux, la serrer contre lui, prendre son visage entre ses mains et parvenir ainsi peu à peu à la griser… Voyons dans le texte :
 
« Ronald : (Au fur et à mesure de sa tirade, le ravissement de Rebecca est de plus en plus sensible) Elève-toi un peu veux-tu, élève-toi un peu, Rebecca !... Comprends que je ne suis pas seulement un « amant » ! Avec toi, je me sens une autre envergure… Ecoute-moi ! Lorsque j’ai monté Macbeth, si je t’ai choisie, toi, plutôt que Heather, Lou, Suzy ou Diana, c’est parce que, dés la première audition, j’ai compris que tu étais une actrice exceptionnelle !... Est-ce que tu comprends ça ? Quand je t’ai vue jouer Lady Macbeth, comment te le dire, j’ai deviné autre chose en toi ! Quelque chose qui me fascine… Ça y est, tu m’écoutes maintenant ! Tu aimes m’entendre parler de la sorte, hein ?... Alors, avant de continuer, accorde-moi un intermède, un entracte !... Redis-moi la tirade de Lady Macbeth que tu dois dire ce soir !... Allons, exécute-toi, cette fois, c’est le metteur en scène qui te l’ordonne ! »
 
              Ou encore, juste quelques tirades plus loin, quand il joue de l’ambiguïté des termes : le mot « gorge » au sens de gorge « égorger », ou au sens de gorge (poitrine) à caresser… Assassiner ou étreindre une maîtresse. Thanatos ou Eros ? Ronald s’amuse avec cela et le spectateur doit en saisir les enjeux…
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Ruin in the island of Skye. (Collection personnelle)

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Epilogue : direction les Orcades !

Publié le par Eric Bertrand

Est-ce parce qu'il s'agissait de la fin de la pièce, mais la répétition qui s'est globalement bien passée au Palais des congrès a « trouvé ses limites » (c’est un euphémisme !) dans ce passage pourtant essentiel pour clore l’aventure. Je resitue les choses. La pièce de Ronald, le Ceilidh, vient de se terminer au pub du Black Cat et deux des membres de la troupe, Rebecca et Heather ont été assassinées
 
              A bord d’une embarcation, le metteur en scène et ses complices ont réussi leur coup et quittent les côtes du Caithness. Les silhouettes de Girnigoe et d’Ackergill s’évanouissent dans le brouillard et Sheumas les amène en direction des îles Orcades…
 
« Maintenant, le tour est joué. Direction les îles Orcades ! Je connais bien les eaux du Pentland Firth : jusqu’au port de Stromness, nous en avons pour une trentaine de minutes. Là-bas, vous serez, comme convenu, accueillis à bord d’un cargo brésilien. Ce sont des hommes que connaît Lou. Aussitôt, vous filerez en direction de Rio de Janeiro ! »
 
              Ils ont deux meurtres sur la conscience et se félicitent de la tournure qu’ont prise les événements. J’explique qu’on est comme dans un final de roman (ou de film) noir. Au lieu d’afficher une certaine décontraction, un relâchement évident, je suggère aux comédiens de dire une partie du texte d’une voix blanche, face public afin de communiquer davantage le frisson d’angoisse
 
« Sheumas :Il a suffi de desserrer le frein à main ! Et plouf !... (Là, il arrête de ramer !) La voiture ne risque plus de remonter !...
Ronald :Avec l’épais brouillard qui s’est répandu dans la région, et tout l’alcool que nous avons bu, nous aurons été précipités au bas de la falaise ! La police peut nous chercher ! La mer est notre couverture ! Tout a fonctionné à merveille. 
Lou :Ça me glace les sangs ! »
 
              Cette angoisse est d’autant plus sensible qu’elle est soulignée par la musique lancinante de Silly Wizard aux deux bouts de la scène en même temps que par la lueur de la torche de Sheumas qui balaie la pénombre. Le spectateur est ainsi impliqué et rentre dans la conscience tourmentée de ces personnages qui ne dialoguent pas véritablement mais qui ont, dans cet horizon de mer et de brouillard un ultime rendez vous avec la partie sombre d’eux mêmes.
              Avant la reprise de la musique, Sheumas avertit le public… Profère un message codé, du style : « N’essayez surtout pas de venir du côté de mon repère ! Il risque de vous arriver malheur ! »…
 
« Lou : Ça doit être la pagaille dans le pub ! S’ils sont suffisamment malins, ils viendront directement sur la Baie des Sinclair… Ils auront du mal à découvrir la carcasse de la voiture et le cadavre de Rebecca dans les rochers…
Sheumas : (Il balade sa torche comme s’il était occupé à chercher les corps) Quel endroit maudit !... Pourtant, tout le monde sait bien qu’il est dangereux de venir se promener la nuit du côté de la Baie des Sinclair !
Lou : Et encore plus dangereux de s’y promener à la sortie du pub ! »
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Girnigoe and Ackergill Tower in the mist (Collection personnelle)

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