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Dosette de lecture n°135 : Shakespeare : « Othello », Iago, l’artisan charcutier de la jalousie

Publié le par Eric Bertrand

             Qu’est-ce que la jalousie, d’où vient-elle et comment monte-t-elle à la tête après s’être insinuée dans les replis d’une âme ? Shakespeare y répond en la présentant comme « un monstre qui voit jaune » et qui « se repaît de la viande qu’on lui donne. »
             Dans cette tragédie particulièrement cruelle où la femme est une victime irréprochable, c’est le traitre Iago qui dresse le monstre et qui le nourrit avec le tact et l’intelligence que donne parfois la haine. Il tient en effet en aversion Othello, le More de Venise, et il se sert de la passion de ce dernier pour sa jeune épouse, « la blanche Desdémone » pour le rendre fou de jalousie.
             Tout au long de la pièce, il manigance, il manipule son entourage (aussi bien que l’habile dramaturge dont il est la figure agissante) et parvient ainsi à enrager sa proie à force de lui distribuer les morceaux de cette mauvaise viande qu’il a dépecée dans le mensonge et l’envie.

 

Dosette de lecture n°135 : Shakespeare : « Othello », Iago, l’artisan charcutier de la jalousie

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De « L’homme à la tête de chou » à « Chambre 69 », épisode 5 : les facettes de l’artiste.

Publié le par Eric Bertrand

        Dans cette aventure à travers l’œuvre multiple de Serge, face à mes acteurs et lecteurs souvent ignorants de son répertoire, il m’a fallu corriger les clichés, gommer le Gainsbarre et tirer les grands traits du Gainsbourg ; car qu’y a-t-il derrière le masque ? Quand on considère que l’acteur, c’est celui qui sait jouer des masques, le sujet de la pièce consistait justement à jouer de cette diversité.
        Pour aller vite, le texte met d’abord en avant l’artiste délirant et l’homme fragile que la passion finit par entraîner à l’hôpital psychiatrique. C’est l’amour fou qui le conduit dans cette impasse : « fou que j’étais de toi, Marilou ». Puis il y a le dandy, le provocateur, celui qui recherche l’absolu dans un monde décevant avec à la fois un côté Baudelaire et un côté Musset dans cette quête de l’Idéal et dans l’expression du dégoût et du cynisme.
        Les recours aux paradis artificiels, alcool et drogues de toutes sortes illustrent à leur façon le rejet du monde et de la réalité. Enfin, pour contrebalancer ce tableau plutôt noir et tragique, l’humour et la dérision ne doivent pas être ignorés, et ils sont très utiles dans une pièce afin d’amuser le spectateur et de relâcher la tension : Serge est un facétieux joueur qui aime les mots, les surprises et les plaisanteries.
Voilà donc quelques-uns des principaux traits d’un personnage dont la figure évolue au fil de l’action, en fonction aussi de tous ceux qui l’entourent et qui contribuent à faire de lui un personnage de roman.
Ce sera le sujet de l’épisode 6.

 

De « L’homme à la tête de chou » à « Chambre 69 »,  épisode 5 : les facettes de l’artiste.

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Dans l’atelier d’un livre sur le livre : épisode 4 : le lieu et le moment

Publié le par Eric Bertrand

            « Il n’y a peut-être pas de jours de notre enfance que nous ayons si pleinement vécus que ceux que nous avons cru laisser sans les vivre, ceux que nous avons passés avec un livre préféré » (Proust)
              Où lisez-vous ? Quel endroit choisissez-vous pour vous abandonner à cette relation si particulière entre le livre et vous ? Un livre est un passeport, il vous accompagne partout où vous l’emmenez et il est capable de rouler avec vous dans les endroits les plus conventionnels ou les plus insolites. Je dis « rouler » car il vous oblige parfois à des contorsions pour parvenir à mettre les lignes que vous lisez en phase avec vos yeux.  Dans ses « plaisirs minuscules » dont il a le secret, Philippe Delerm évoque l’incommode activité de la lecture sur la plage : (« Lire sur la plage », La Première Gorgée de bière ») et, dans ses « Journées de lecture », et, moins à l’aise avec son physique, Proust se revoit, assis « sur une chaise, près du petit feu de bois ». Chez l’un et l’autre, l’envie est la même mais l’expérience de la durée n’est pas identique et l’inconfort de la plage vient mettre son grain de sel. Comme le caméléon, le livre est capable de se fondre dans un milieu, un paysage, d’épouser une couleur, de capter une odeur. Et quand vous repensez au contenu de ce livre, il est indissociable de la matière dans laquelle il a « levé ».
              Ces questions de la « position » du lecteur et de la « matière associée » m’ont beaucoup intéressé dans mon roman. J’ai aussi eu recours au regard des peintres sur les lecteurs afin de mettre en scène mes personnages. À ce stade, j’ai trouvé dans « Une Histoire de la lecture » de l’excellent Alberto Manguei d’autres pistes relevant du comportement des lecteurs au fil des siècles et des représentations. Mais je ne fais pas comme lui une étude poussée du phénomène, ce qui m’intéresse, c’est de glisser à l’intérieur de la narration ce témoignage de l’attachement aux livres et ce mélange d’attirance ou de répulsion. Et vous, où et dans quelles positions lisez-vous ?
               La semaine prochaine, je reviens sur quelques-uns de ces témoignages.

PS : je rajoute à cette chronique les nouvelles de la progression de mon roman : les choses s’accélèrent. Je l’ai envoyé fin octobre chez l’éditeur, j’ai eu accord du comité de lecture et le contrat a été signé. À l’aide des indications de la correctrice qui s’occupe du manuscrit, je procède à une ultime relecture et correction (il y a eu peut-être déjà dix relectures depuis que je l’ai terminé en mai dernier, mais, en même temps que l’élaboration du contenu, le soin du style est essentiel.)

 

 

Dans l’atelier d’un livre sur le livre : épisode 4 : le lieu et le moment

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Dosette de lecture n°134 : Kessel : « Les Mains du miracle ». La torture part de l’estomac

Publié le par Eric Bertrand

                 Est-il possible, quand on est seul, de contrer l’action dévastatrice de l’un des fidèles lieutenants d’Hitler ; de tordre le bras d’un fonctionnaire zélé et prêt à tout pour servir la cause de son führer ? Oui, à condition que l’opération se joue entre deux hommes, dans le huis-clos qui réunit le médecin et son patient.
                  Le sinistre Himmler, Chef de la Gestapo, remplit aveuglément sa fonction, mais tout son corps semble s’y refuser et manifester une forme de rejet inconscient par de terribles maux d’estomac. Seul, le docteur Félix Kersten, ostéopathe surdoué, peut éteindre le feu de ce « tank » où bouillonnent à la fois la haine et la fureur gastrique … Mais s’il parvient à ses fins, c’est seulement à condition que le tankiste enragé, avant de s’en remettre aux « mains du miracle », veuille bien accepter de dévier sa route et de laisser, quelques instants au moins, l’empreinte de ses chenilles maléfiques tourner dans le vide.

 

Dosette de lecture n°134 : Kessel : « Les Mains du miracle ». La torture part de l’estomac

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De « L’homme à la tête de chou » à « Chambre 69 », épisode 4 : la mise en scène.

Publié le par Eric Bertrand


                Tout au long de ces années avec Gainsbourg, j’ai eu la chance de partager ma passion avec les élèves mais aussi avec des partenaires présents sur scène ou hors de scène. J’ai évoqué l’atelier d’expression artistique en Bretagne et la volonté de mêler les arts. Ainsi, la danse et notamment les claquettes ont tenu une grande place dans la mise en scène. Le rythme des musiques de Serge a inspiré de nombreuses chorégraphies à mes deux collègues, par exemple celle sur l’air de la chanson « Bubble gum ».
                 Pour canaliser l’énergie et l’exubérance des personnages sur scène, il fallait aussi pouvoir compter sur le professionnalisme des metteurs en scène. Camille Geoffroy avec qui j’ai travaillé pendant une dizaine d’années au lycée Vieljeux de La Rochelle est danseuse de formation. Elle a su créer des « tableaux » et des moments forts répartis entre les trois « lieux » et les trois actes de la pièce : le « Lunatic asylum » (lieu de la folie et du souvenir), le bar du Kangourou Club (lieu du fantasme et de la séduction) et la route (lieu du désenchantement et de l’affrontement).
                 Par ailleurs, elle a dirigé avec sensibilité, tact et ténacité des acteurs adolescents qui ne sont pas toujours « dans le rôle » et qui gèrent au quotidien une infinité de conflits personnels. Malgré le déséquilibre entre garçons et filles, malgré les humeurs et les tensions liées au choix de la distribution, elle leur a donné une silhouette, une voix, une fonction à l’intérieur de la pièce et le résultat a été éblouissant : la vidéo qui suit le souligne bien.
                 La semaine prochaine, je reviens sur l’image que ce spectacle donne de l’univers de l’artiste.


https://youtu.be/evud2pq466o?si=8z58ceH7QSpdXjd6

 

De « L’homme à la tête de chou » à « Chambre 69 »,  épisode 4 : la mise en scène.

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