Quelle vie improbable et inconnue de tous une vieille dame a-t-elle déjà vécue ? Quelles épreuves et quelles émotions a-t-elle pu traverser tout au long de sa vie quand elle n’avait pas la silhouette meurtrie et fatiguée qu’elle traine derrière elle aujourd’hui ? Baudelaire avait déjà longuement médité sur ces « petites vieilles », ces « êtres singuliers, décrépits et charmants, sur qui pèse la griffe effroyable de Dieu » et lorsque, de passage à Ostende, le narrateur de cette nouvelle s’installe pour quelques jours dans une maison d’hôte face à la mer, il s’interroge sur le regard mélancolique de sa logeuse. Assise dans son fauteuil, usée, mélancolique, elle passe son temps à contempler la mer, le regard fixé à l’horizon des dunes.
Peu à peu mise en confiance par celui qu’elle sait être un écrivain, « un porteur de mensonges », elle consent à évoquer ce souvenir lumineux qui lui était venu, comme un mirage, par le sable de la plage, jadis, du temps qu’elle était jeune. Et ce souvenir n’est pas sans lien avec la création littéraire et avec ce que la vie peut offrir de plus précieux à une jeune fille rêveuse…
Avec beaucoup de brio, E.E Schmitt parvient à mettre son lecteur en haleine et à l’amener à s’asseoir aux côtés de la vieille dame pour… contempler la mer. Cette nouvelle qui donne son titre au recueil est suivie de quatre autres récits, tout autant surprenants : « La Guérison », « Crime parfait », « Les Mauvaises lectures », « La Femme au bouquet ».