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Avatars des idiomes populaires : chauve-souris et cafards

Publié le par Eric Bertrand

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           Avoir le cafard ! L’insecte n’est pas une figure agréable à fréquenter d’autant que la plupart du temps, il monte au cerveau ! Baudelaire qui a vomi le spleen et accusé les traits des « infâmes araignées » venant « tendre ses filets au fond de nos cerveaux » trouvait les bonnes images pour évoquer cette déroute de l’Espoir. Ce que l’expression idiomatique « Avoir une araignée au plafond » contribue très bien à restituer.
            Il semble que l’insecte soit une spécificité française : en portugais, on dit « avoir de petits singes dans le grenier », en néerlandais « avoir reçu un coup de moulin » et en anglais, « avoir des chauve-souris dans le beffroi ».


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Avatars des idiomes populaires : dire la mort qui dure

Publié le par Eric Bertrand

100-6781.JPG          Après le coup de grâce de la Faucheuse comme écrit Brassens, « la rencontre au coin d’un bois de sa majesté la mort », le temps passe et l’intéressé « mange ou fume les pissenlits par la racine ». Le monde est inversé et l’activité des sens persiste selon l’imaginaire des langues. « Fumer », ce n’est pas « tirer des bouffées  de tabac » et s’intoxiquer (il n’est plus temps et, à ce stade, on s’en fiche !) mais engraisser la terre. On disait aussi plus joliment « fleurir les pissenlits »
          Les Allemands dédaignent les pissenlits et posent un œil plus attendri sur les radis : le mort « regarde les radis par en dessous ». Fort de sa position, il est, d’après les Néerlandais, « couché sous les mottes vertes » et même, pour les Anglais, doté d’une vigueur nouvelle puisqu’il « pousse les marguerites vers le haut » (« to push up the daisies ») sans jamais plus, hélas, pouvoir les effeuiller !

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Article du mois : « les Neiges du Kilimandjaro »

Publié le par Eric Bertrand

 

Il est nuit. La cabane est pauvre, mais bien close.
Le logis est plein d'ombre et l'on sent quelque chose
Qui rayonne à travers ce crépuscule obscur.
Des filets de pêcheur sont accrochés au mur.
Au fond, dans l'encoignure où quelque humble vaisselle
Aux planches d'un bahut vaguement étincelle,
On distingue un grand lit aux longs rideaux tombants.
Tout près, un matelas s'étend sur de vieux bancs,
Et cinq petits enfants, nid d'âmes, y sommeillent (...)

           Ainsi commence ce long et beau poème de Victor Hugo extrait de la légende des siècles et intitulé « les pauvres gens ». Le cinéaste Robert Guédigian (à la sensibilité hugolienne) y rattache directement son dernier film, « les Neiges du Kilimandjaro », qui met en scène des personnages attachants issus des milieux populaires et notamment celui des dockers de Marseille.
           Suite à une vague de licenciements et pour tâcher de sauver l’entreprise, le comité syndical que dirige le héros, Michel, met en place un tirage au sort dont sont victimes une vingtaine de membres dont le fameux Michel, qui n’a pas voulu abuser de son droit d’élu et qui doit prendre une retraite anticipée.
           C’est une page qui se tourne et une petite fête d’adieu est organisée autour du couple simple et courageux qu’il forme avec Marie-Claire. Après cotisation collective, les camarades offrent symboliquement aux jeunes retraités un « coffre » : dans le coffre, un billet d’avion pour la Tanzanie, au pied du Kilimandjaro et de « l’argent de poche » (environ deux mille euros). Des chansons, des souvenirs, des confidences et beaucoup d’émotion autour de l’événement. Et la chanson, « les Neiges du Kilimandjaro » bien-sûr...
           Et puis la vie reprend pour le couple dans cette nouvelle retraite qui prépare « le grand voyage ». Mais un soir, violent changement de cap avant l’Afrique. Attaque à main armée au domicile, opération de rapine, et « le trésor », les cartes bleues sont raflés. Déraillés, les anciens dockers se retrouvent ébahis, dépassés par ce geste lâche qui a forcément été commis par l’un des « témoins de la fête ».
         Et de fait, Michel remonte facilement à la source lorsqu’il surprend dans un bus deux enfants occupés à lire le magazine de « Strange » qu’en clin d’œil à sa passion d’adolescence, son ami d’enfance lui avait offert en même temps que le coffre.  L’agresseur est aussitôt arrêté, condamné, et Michel et les autres satisfont ainsi la soif de vengeance du clan... Mais parallèlement, ces anciens syndicalistes au grand cœur, ces jeunes idéalistes militants (qui se sont retrouvés du jour au lendemain comme le dit Marie-Claire « vieux et retraités »), constatent qu’en punissant le coupable, ils ont aussi atteint au cœur un foyer en déroute, et notamment les deux jeunes frères de leur agresseur. Ces derniers n’ont ni père, ni mère pour s’occuper d’eux. Avant le drame, c’était le grand frère qui tâchait de les élever comme il le pouvait, le grand frère victime comme Michel du tirage au sort et du licenciement...
          Alors, courageusement, chacun à sa manière, Michel et Marie-Claire font machine arrière sans rien dire à l’autre, et oeuvrent pour aider les deux enfants abandonnés. La scène finale a lieu sur la plage. Michel ne sait pas que Marie-Claire s’occupe plusieurs heures par semaine des enfants. Elle lui a dit qu’elle aidait une amie. Il la retrouve par hasard accompagné des deux gamins, un peu comme le marin des « Pauvres gens » qui trouve qu’il devrait demander à sa femme de bien vouloir élever les orphelins qui viennent de perdre leur mère. La dernière image indique clairement la référence : « ce film est inspiré du poème de Hugo »
L'homme prit un air grave, et, jetant dans un coin
Son bonnet de forçat mouillé par la tempête :
"Diable ! diable ! dit-il, en se grattant la tête,
Nous avions cinq enfants, cela va faire sept.
Déjà, dans la saison mauvaise, on se passait
De souper quelquefois. Comment allons-nous faire ?
Bah ! tant pis ! ce n'est pas ma faute, C'est l'affaire
Du bon Dieu. Ce sont là des accidents profonds.
Pourquoi donc a-t-il pris leur mère à ces chiffons ?
C'est gros comme le poing. Ces choses-là sont rudes.
Il faut pour les comprendre avoir fait ses études.
Si petits ! on ne peut leur dire : Travaillez.
Femme, va les chercher. S'ils se sont réveillés,
Ils doivent avoir peur tout seuls avec la morte.
C'est la mère, vois-tu, qui frappe à notre porte ;
Ouvrons aux deux enfants. Nous les mêlerons tous,
Cela nous grimpera le soir sur les genoux.
Ils vivront, ils seront frère et soeur des cinq autres.
Quand il verra qu'il faut nourrir avec les nôtres
Cette petite fille et ce petit garçon,
Le bon Dieu nous fera prendre plus de poisson.
Moi, je boirai de l'eau, je ferai double tâche,
C'est dit. Va les chercher. Mais qu'as-tu ? Ça te fâche ?
D'ordinaire, tu cours plus vite que cela.

- Tiens, dit-elle en ouvrant les rideaux, les voilà!"

 

 

 

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Avatars des idiomes populaires : dire la mort immédiate

Publié le par Eric Bertrand

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              La mort est un sujet assez grave pour que les hommes l’abordent sous toutes ses formes, artistiques ou non. Le biais de la plaisanterie est souvent privilégié notamment dans le dispositif du langage qui procède souvent par volonté d’atténuation de la douleur ou du tragique que la réalité de la chose implique.
              L’argot préfère le délicat « casser sa pipe » ! La vie est ainsi représentée comme un petit tube fragile (tout dépend de la matière dont est constitué ce tube !) qu’on fume le temps de quelques années. Pas de métaphore minérale pour l’espagnol qui affirme que mourir c’est « étirer la jambe », ce que le portugais nuance en suggérant que c’est plutôt « tendre le jarret ». Affaire de détente, la mort comme ultime épreuve d’athlétisme dans le décathlon de la vie !
             Ces quelques expressions concernent en tout cas le moment de la mort, le déclic qui fait passer de vie à trépas... Mais l’histoire ne s’arrête pas là : quand on a « fait le grand saut », quand on est mort, c’est pour longtemps et les langues nous réservent d’autres charmantes formules qu’on détaillera demain.  

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Avatars des idiomes populaires : mettre en boite

Publié le par Eric Bertrand

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Certains tempéraments facétieux aiment bien s’amuser aux dépens des autres et tirer parti de « la bonne mine » de celui qu’ils « mettent en boite ». C’est un peu comme un pantin dont ils se plaisent à tirer les ficelles car ils en connaissent parfaitement le fonctionnement. Une fois mis en boite, le pantin a du mal à échapper au piège de la plaisanterie et, comme on dit, « il a bon dos ». Surtout si on l’a mis dans « la boite de Pandore » avec le reste des maux !


            Peut-être que les Anglais trouvent plus amusant le fait de « tirer la jambe de quelqu’un » : « to pull someone’s leg. » ; Le résultat est le même : il s’agit de faire perdre l’équilibre pour s’amuser de la maladresse du boiteux ! J’en connais de ces albatros !


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