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« Zone extrême » retrouve le « Loft History 2084 » (2/6)

Publié le par Eric Bertrand

                 Avant de me lancer dans un parallèle entre le « Loft History 2084 » et « Zone extrême », pour ceux qui n’auraient pas été au rendez-vous, je rappelle brièvement les enjeux de l’émission : les joueurs engagés acceptent de participer à un jeu de mémoire et d’aller jusqu’au bout des 27 questions pour empocher une grosse somme…

        Jusque là, rien que de très banal, et depuis plusieurs années, on connaît la chanson ! Le regretté Ferrat ne chantait-il pas « la Roue de Fortune » dans le texte « A la une » ?  Mais prenons garde ! Dans les hautes sphères de la téléréalité, plus le temps passe et plus il faut innover ! Comparé à ce nouveau jeu, « la Roue de la Fortune » est un manège pour gosses ! Mais un manège dont le carillon est la Télévision.

N’oubliez pas que la TV, c’est notre prophète !…Vous marchiez pieds nus dans le désert et Big Brother vous a regardés !…clamait l’une des animatrices du « Loft History »...

        Il faut innover donc, et en même temps régaler le voyeurisme sadique d’un téléspectateur manipulable à souhait,  fatigué de sa journée, et, de ce fait, sujet à ses pulsions les plus grossières. D’autant qu’il s’identifie parfaitement à l’heureux gagnant du jeu télévisé... Comme s’exclamait « la Goulue » dans le « Loft History » avec son nom et son audace de catcheuse :

Ce sera moi la vedette ! La grande vie dans le loft aménagé pour moi. La descendante de Barbie Du Loft, la Goulue Du Loft, la super star du nouveau loft story ! Les producteurs vont s’étriper pour moi, les contrats publicitaires vont pleuvoir, je vais faire un disque et je vais chanter : « Je ris de me voir si belle en ce miroir ! »

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« Zone extrême » retrouve le « Loft History 2084 » (1/6)

Publié le par Eric Bertrand

                    L’émission au titre tapageur de « Zone extrême » proposée mercredi soir sur France 2 m’intéressait particulièrement non pas parce que – comme certains l’ont cru - elle proposait au spectateur une nouvelle distraction dans la gamme « Téléréalité », mais parce qu’elle se présentait comme une expérience menée en laboratoire à partir de cobayes humains. Quelques années après le « Loft Story », une nouvelle forme de « Philosophie dans le boudoir » aux accents étrangement sadiques sinon sadiens !

                     Lorsqu’en 2003, j’ai écrit « Loft History 2084 » (Aléas éditeur), j’avais lu des ouvrages qui abordaient la question de l’effet du conditionnement sur l’individu. J’avais également mis en scène une pièce de Marivaux étrangement moderne de ce point de vue : une sorte de téléréalité sans la télé ! « La Dispute ». Mais dans Marivaux, les personnages étaient sur une île déserte (pas « l’Ile de la tentation » !), surveillés par un marquis et une marquise, et dans le Loft, ils étaient dans un studio, surveillés par la télé... « Zone extrême », prolonge cette réflexion sur le pouvoir hallucinant de la télévision (...)

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Adolescence et organisme

Publié le par Eric Bertrand

                  A quelques jours de la sortie de l’Organisme, (l’éditeur m’a annoncé l’arrivée du livre chez Aléas la semaine prochaine) je reviens sur le thème majeur que j’y ai surtout abordé : l’adolescence. Si le milieu dans lequel j’étudie cet âge si particulier est le collège, c’est parce que c’est là que l’enfant passe des moments qui le modèlent et lui font prendre conscience du changement profond qui s’opère en lui.

                 Ce changement est abordé dans le roman surtout sous les angles suivants : la mutation physiologique, corps, voix, gestuelle, la confrontation avec les adultes et l’adhésion au groupe, la tension entre l’enfance et la maturation, la recherche de la grâce couplée à des pulsions vers l’ordure.

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« Persepolis » de Marjane Satrapi : 4/4. Folon and co

Publié le par Eric Bertrand

                           folon                           C’est cette violence que rejette la famille de Marjane et particulièrement l’oncle Anouche qui, dans sa jeunesse, avait collaboré à la constitution d’une petite république en Azerbadjan, entreprise réduite à néant par le régime... Anouche doit alors s’exiler et franchir de hautes montagnes du haut desquelles il médite, « voyageur au-dessus d’une mer de nuages ». Ce tableau de Friedrich renforce, s’il en est besoin, l’impression romantique que dégage la figure de l’oncle aux yeux du spectateur et de la petite fille.

                            Digne héritière de son oncle, Marjane est idéaliste et entière. En amour, elle porte très haut ses exigences et va forcément de désillusions en désillusions. L’impression  d’innocence contrariée est parfaitement rendue par les citations des tableaux de Folon ou des figures de Peynet qui nourrissent chacun des épisodes de ses idylles. Les amants de Marjane sont de piètres individus qui la font tomber de haut. A chaque fois, l’Amour la fait décoller, et à chaque fois elle s’écrase. Mais point de sentimentalisme ! Le thème de la prise de conscience est toujours traité avec un humour décapant : ainsi, la caricature de Marcus, qui apparait au début de la romance comme un véritable petit prince, est particulièrement réussie et le discours qui déconstruit la romance châtie l’imposteur de façon cinglante !

                             Peut-être les élèves ne goûtent-ils pas également cette vision de l’adolescence que nous offre Marjane Satrapi lorsqu’elle force le trait pour caricaturer sa propre adolescence. Sortant à peine de « l’Organisme », dont je rappelle que c’est le thème principal, j’ai évidemment savouré ce passage où elle décrit par une série de gros plans sur les différentes parties de son corps les mutations de sa silhouette et de son visage. L’une des étapes de la mutation passe par la citation d’une figure horizontale du célèbre tableau « Guernica », ce qui, une fois de plus, est signe de distance ironique.

picasso 

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« Persepolis » de Marjane Satrapi : 3/4 : « le Cri »

Publié le par Eric Bertrand

friedrich

                         Le plaisir du spectateur est aussi lié au graphisme du dessin. Le film est une animation à partir de la bande dessinée du même auteur. Le dessin est expressif et varié. Il réinvestit des tableaux connus comme ceux de Folon, de Friedrich, de Picasso ou de Munch… Il y a dans ce film, en d’autres termes, ce qui en matière d’art s’appelle une réécriture, stimulante à observer pour tout esprit curieux (mais la curiosité n’est pas la meilleure qualité de nos élèves !)

                         Revisitons « le cri », « Guernica », « Voyageur contemplant une mer de nuages », et les peintures de Folon ou les silhouettes dessinées par Peynet. A un moment du film, lorsque Marjane revient dans son quartier, une bombe a explosé. Vision d’horreur… Cette horreur débouche sur la silhouette de la jeune fille qui pousse un cri d’angoisse, cri que le peintre Munch, dans le tableau du même nom, a parfaitement rendu dans sa dimension quasi expressionniste. L’horreur est également présente dans la vision des massacres perpétrés par Saddam. Explicitement, l’image recompose les traits du célèbre tableau de Picasso « Guernica » qui abandonne le figuratif pour y préférer le symbolisme.

images

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