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Les oliviers et la mousse du bosquet

Publié le par Eric Bertrand

Une petite info avant de retrouver le journal : le site « auteur » est remis à jour, il comporte les derniers éléments liés au Ponton (couverture, photos, annonces diverses…) Rappel de l’adresse : http://www.ericbertrand.fr
 
               « Journal du 13.08 : je suis en train de finir la relecture et je retravaille la scène qui se passe chez Gilda. Il y a d’abord l’épisode du bosquet qu’il faut préciser. Le thème du bosquet est un cliché, il faut lui donner plus de réalité, d’où les précisions que j’ai apportées : tout au long du sentier qui mène à la villa, il y a des oliviers, et entre chaque olivier, un tapis de mousse (détail important pour le confort de ce qui va s’y jouer)
              D’autre part, autre moment important, celui de la confrontation entre Carolina et Gilda : il faut mieux faire comprendre ce que cette fille réveille comme souvenirs difficiles chez les deux sœurs. D’où une analyse plus juste de la confrontation, et le motif de la gifle qui est nouveau et qui conclut la scène.

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Il blu della Sicilia e l'acqua dappetutto...

 

Rubrique Goncourt :
Une rentrée Goncourt très chargée
 
              Semaine riche en événements à l’horizon… Tandis que les Académiciens préparent leur annonce du Prix Goncourt 2006, en classe ce matin, nous définissons le tiercé gagnant et chaque élève justifie clairement son choix. Mardi, nous organisons notre second café littéraire en présence d’une équipe de FR3 qui tourne un reportage sur « le Goncourt des lycéens en France », et, toujours mardi, un peu plus tard dans la journée, élection du délégué que j’accompagnerai vendredi matin à Rennes pour les délibérations régionales. Lundi prochain, enfin, ce sont les délibérations nationales. J’essaierai de tenir un petit reportage régulier tout au long de cette semaine…
 
Réaction de collègue :
Et merci aux méditerranéennes et à celles de l’ »Ouest » (c’est 
marrant, vous en parlez peu de ce roman, ici, les élèves apprécient et 
Sylvain et moi trouvons que c’est un des meilleurs textes). Le blog 
d’Albert… a collapsé juste après que j’ai copié le lien pour vous le 
transmettre hier. Ce week end, il est donc dans le coma, et moi pas 
très loin de l’apoplexie.
Je suis bien contente que ce Boulin (avec lequel on peut contrepéter, 
Jean hélin bourrique ou Jean Elic Bourin) se soit montré aussi piètre, 
cela dit sur le blog de la fnac, il attire les minettes énamourées.
Quelle chance vous avez d’être autant suivis par vos fnac : chez nous, 
rien depuis Troyes, où le délégué s’est borné à nous accompagner - 
c’est super, les petits-déjs lecture !
 
 
Entre deux réflexions sur le déroulement des élections, je vous propose un lien plutôt attractif où il est possible d'entendre plusieurs auteurs de la sélection parler de leur roman...
En cadeau, une jolie citation tirée du Bois des amoureux qui pourrait être, à mon avis, un point de départ intéressant pour une réflexion sur ce que le romancier apporte au lecteur...
"Il y a des gens comme ça, Fasbellon, ça vous dépasse, hein, des gens qui donnent. Des gens qui sont chargés de voir pour les autres, de vivre pour ceux qui ne savent pas vivre, des gens qui ont la tâche de vivre pour ceux qui ne sont pas nés ou pour ceux qui sont morts, des gens qui regardent pour ceux qui n'ont pas d'yeux, voilà, maître Fasbellon, voilà... je veux dire des gens comme... comme je ne sais même pas comme quoi, des gens, si vous voyez ce que je veux dire, Fasbellon." (p.122)
Par ailleurs, je serais curieux de connaître les avis des uns et des autres sur les Bienveillantes : à 200 pages de la fin, je suis, personnellement, plutôt indécis, mais ne partage pas les avis assassins ou dithyrambiques de certains critiques, dont la lecture caricaturale me laisse penser qu'ils n'ont pas dépassé la "Toccata"... Le vrai défaut du bouquin, selon moi, n'est pas (comme on l'a entendu) la complaisance dans le morbide, mais plutôt un certain manque de...romanesque : je n'ai pas été emballé par les longs passages qui font le compte rendu des réunions et autres conférences - comme si Littell s'était contenté de retranscrire au lieu de recréer... Deux passages m'ont en tout cas marqué : la "sélection" (pp.558-560 - qui mériterait un rapprochement avec le début de Si c'est un homme) et les réflexions qu'inspire au narrateur un important discours de Himmler (pp.610-618), qui font écho aux premières pages du livre.

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Les jeux de caractère.

Publié le par Eric Bertrand

« Suite du journal du 12.08 : Ainsi je travaille le côté rebelle d’Ornella qui se manifeste dés l’adolescence, le côté trouble de Tiziana, le côté calculateur de Salvatore sur le ponton. Comment un manipulateur s’y prend-il dans un espace de transparence comme un ponton ? Il a notamment la fonction de révéler Tiziana, de la faire sortir de ses gonds et conventions.
              Il faut donc décrire la jeune fille comme une créature guindée qui ignore sa féminité et qui ne sait pas mettre en valeur sa beauté et sa grâce. C’est cela aussi la fonction du ponton et sa valeur expérimentale. Cette prude, pétrie de principes découvre la sexualité. Il faut le suggérer.
              Salvatore est tendance sadique. Il joue sur le désir de sa partenaire… mais il ne fait que jouer. Il n’a pas envie d’aller plus loin. Ce qu’il cherche surtout à faire, c’est se venger d’elle. Par ailleurs, dans le processus d’écriture et d’analyse, je « vois » beaucoup plus mes personnages et je décèle leurs tics : petit bout de langue de Gilda quand elle est heureuse, passion de l’autorité de Tiziana…

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Un po di sale nei personnagi...

 

Rubrique Goncourt :
Lecture des Bienveillantes
 
              Après onze jours de « siège », j’achève aujourd’hui 3 novembre la lecture de cet énorme roman. En dépit des apparences, je ne suis pas un lecteur assidu. Trop de sollicitations, pas l’habitude, ni le temps de tout mettre en veilleuse et de me plonger deux à trois heures d’affilée en pleine journée dans la lecture… Mais là, pas le choix ! C’est aussi le contenu de la mission que j’ai acceptée… Et ce soir, c’est un immense soulagement, celui de l’avoir accomplie (car avec les Bienveillantes, c’est aussi la fin de toutes les autres lectures ! Même si je concède ne pas avoir bien lu certains ouvrages « qui ne passaient pas » : le Bois des amoureux, Quartier général du bruit, Supplément au roman national, Contours du jour qui vient…)
              Quelle libération ! Cours à préparer, copies, activités sportives, théâtre, écriture… Difficile de tout concilier avec cette charge supplémentaire ! Nous allons passer sereinement à la phase publique de cet effort de lecture. J’y consacrerai des articles, en alternance avec cette série un peu longue sur les Bienveillantes, pour lequel j’ai tenu un « carnet de bord » spécial dont je livre le contenu très prochainement.
 
Réaction de collègue :
Pour compléter ce que tu dis sur le titre et Electre,
je peux rajouter que j'ai fait travailler mes élèves
sur l'Orestie: les rapprochements entre le narrateur
et Oreste sont plus qu'évidents et assez féconds. Sans
compter la fonction des autres personnages. D'ailleurs
l'auteur a refusé de placer le problème du mal dans
une perspective judéo-chrétienne mais a préféré le
développer à la lumière de la tragédie grecque et du
concept de la "dikê".
 

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Va et vient du dramatique au narratif et vice versa

Publié le par Eric Bertrand

Dans l’attente de nouveaux événements, je reprends le fil du « journal de création du Ponton », là où je l’avais laissé :
              « Journal du 12.08 : l’une des différences qui m’apparaît au fur et à mesure des corrections qui avancent (j’en suis à la page 24), c’est que, dans le narratif, je m’attache beaucoup plus à la psychologie des personnages, à ce qui se passe sous la peau et à toutes ces manifestations qui effleurent dans l’analyse et qui passent inaperçues au théâtre. Au théâtre, les choses doivent être manifestées de façon beaucoup plus évidente et tant pis si le spectateur ne les perçoit pas.
              Même si, dans ma relecture de la pièce, je vais faire en sorte d’enrichir le texte de ces nuances, il me semble impossible de les intégrer. D’où, une fois de plus, l’intérêt de cette formule d’ouvrage double dans laquelle, décidément, je trouve intéressant de m’investir !... Quelles sont ces « nuances » dont je parle ? Quelques exemples demain...
 
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Gira, gira la testa di Gigi...

 
 
Rubrique Goncourt :
 
Interview d’Amélie Nothomb. Rencontre du 11 octobre. (4/4)
 
 
Vous dîtes toujours avoir peur du ridicule, de vous faire trop remarquer mais pourtant vos livres sont tellement spéciaux…
 
Vous avez tout à fait raison, c’est très paradoxal. C’est vrai qu’il y a en moi ce côté très adolescent : « -surtout ne nous faisons pas trop remarquée… » et en même temps mes livres ne collent pas avec cela. Mais j’assume tous mes paradoxes, ce paradoxe se retrouve d’ailleurs dans Journal d’ Hirondelle, c’est un livre sur le thème du secret. En soi c’est un paradoxe car est-ce que le meilleur secret ne serait pas de ne pas écrire de livre ? Mais non, le livre doit quand même exister, il doit exister pour que le secret soit préservé, c’est absurde !
 
Donc vous êtes quelqu’un qui se décrit comme paradoxal…
 
Oui enfin j’ai l’impression qu’on est nombreux dans la confrérie ou du moins, j’essaie de me rassurer en le pensant…
 
Et avez-vous eu d’autres projets avant d’écrire vraiment ?
 
Aucun. C’est aussi une chose qui, je croie, me différencie de beaucoup de gens, c’est que je suis un peu un néant, je ne suis bonne à rien, je n’ai pas particulièrement envie de faire 10000 choses, j’ai envie d’écrire, point. Je suis une vraie monomaniaque, et cela tombe bien car je n’ai de talent pour strictement rien d’autre. Je suis moi-même entourée de gens qui ont tous les talents, qui défilent bien, qui jouent d’un instrument de musique, qui font du sport… Moi, en dehors de l’écriture vraiment, il n’y a rien. Mais je constate que ce rien m’a quand même conduite à quelque chose parce que vos m’auriez rencontrée à vos âges, je n’étais rien, je n’étais pas comme vous. Jamais je n’aurais participé au Goncourt des lycéens, jamais je n’aurais eu le courage de faire une chose pareille. Ce qui m’a permis de dépasser mon isolement qui était formidable, c’est le fait d’écrire et le fait de publier des livres. C’est une intégration par voie de littérature.
 
Votre « isolement formidable » est encore un autre paradoxe…
 
(rires) Oui, c’en est un.
 
Et connaissez-vous d’autres écrivains dans ce milieu ?
 
Vous savez, c’est très difficile. Ma position n’est pas facile parce que je suis un écrivain très envié, cela fait 14 ans que je suis best-seller et il n’y en a pas d’autres que moi à l’être depuis si longtemps. En plus je ne suis pas cacochyme, je n’ai pas l’air foncièrement désespérée donc ça suscite de grandes jalousies chez les autres et il n’y a rien à faire quand je vais au devant d’eux, c’est peut être paranoïaque de ma part mais je ne le pense pas, je sens toujours des sous entendus extrêmes qui sont gênants, il n’y a pas de transparence, il y a toujours des petites perfidies qui sont lancées… Finalement les seuls écrivains avec lesquels je peux vivre de grandes amitiés sont les écrivains de best-seller car il n’a y pas ce côté :  « -Oui mais vous n’êtes qu’un écrivain commercial » ou des petites piques comme ça. Je suis par exemple très amie avec Henri-Emmanuel Flique qui en effet a des ventes phénoménales donc quand je le vois je sens bien qu’il ne se pose pas la question :  « -Est-ce qu’elle vend plus que moi ?? » (rires).
 
Donc ce côté commercial, vous l’assumez totalement…
 
Vous savez je ne l’ai pas fait exprès mais d’autre part je ne pleure pas. Franchement, gagner beaucoup d’argent, je ne vais pas vous dire que c’est foncièrement désagréable ! (rires)
 
Et comment accueillez-vous la critique ?
 
Avec l’habitude… Vous savez on n’est pas best-seller depuis 14 ans sans des démolitions à n’en plus finir… Ca a commencé dès le deuxième livre, je ferais même mieux de dire dès le premier qui a été « ratiboisé » par la critique en Belgique mais à cause du nom que je porte. Par contre en France, ô merveille personne ne savait qui étaient les Nothomb, cela s’est très bien passé. La France m’a un peu fait l’effet d’être le pays du Salut, vous savez un peu comme l’Amérique pour les Européens, les bagnards qui fuyaient … Tout dépend du niveau, les critiques pour journal d’Hirondelle n’ont pas été bonnes par exemple mais franchement ça va. L’an passé j’ai écrit le livre Acide sulfurique qui m’a valu des critiques insupportables…
 
Ce livre est pourtant magnifique, vous faîtes la juste comparaison de la télé-réalité et des camps de concentration…
 
C’est très gentil vous me faîtes bien plaisir en me le disant mais si vous saviez,j’ai été vraiment humainement insultée et ce qui était pour moi insoutenable, c’est qu’on m’accusait, avec ce livre, d’insulter les victimes de la Shoah… Alors que c’était exactement le contraire ! J’ai écrit pour que cela ne se reproduise pas car il me semble que l’on n’est jamais vraiment à l’abri de ces choses là. Ca c’était vraiment une insulte gravissime très très pénible à endurer. Après ça si on se contente de dire que votre livre est nul, vous haussez les épaules.
 
Mais les critiques restent des critiques et les lecteurs avant tout des lecteurs !
 
Exactement. C’est pour les lecteurs qu’on écrit.
 
La grande majorité de vos lecteurs a d’ailleurs aimé Acide sulfurique !
 
Ah bah vous me faîtes plaisir ! (rires)
 
Et justement, que pensez vous réellement de la télé-réalité ?
 
Franchement j’en pense exactement la même chose que ce qui est dit dans ce livre. Alors il y a des critiques qui m’ont dit : « -Mais enfin comment pouvez vous comparer la télé-réalité avec les camps de concentration ? Quand bien même on pourrait avouer qu’il y a des choses graves dans la télé-réalité, cela n’atteint pas du tout ce degré ! ». Je leur ai alors demandé s’il fallait attendre l’insoutenable pour réagir ou réagir dès que ça devient inacceptable. C’est exactement ce qu’il s’est passé en 1940, c’est parce que les gens disaient : « -Oui mais ils ne sont que déportés… », on ne savait pas qu’ils étaient gazés mais est-ce que l’idée qu’ils soient déportés n’est pas déjà insoutenable ? N’y avait-il pas déjà de quoi réagir ? Donc il faut réagir tout de suite, il ne faut bien sûr pas attendre qu’il soit trop tard pour le faire !
 
Réaction de collègue :
 
Je viens de lire le message de Véro et je n’ai rien à ajouter. Je partage l’analyse y compris les effets de la rencontre sur les élèves qui, pour certains des miens, étaient persuadés qu’ils allaient s’ »em… » ( ainsi qu’ils l’ont dit ensuite à Mylène Reboul, notre représentante de la FNAC lors de sa visite hebdomadaire). Ils ont été enchantés et redynamisés pour la majorité, avec des jugements assez pertinents sur les auteurs : on s’amuse avec Boulin ( genre jeu du chat et de la souris mais les élèves se sont pris pour les chats et non l’inverse !), et on prend au sérieux Audouard surtout. Olivier Poivre d’Arvor qui a mis longtemps à se dérider, a moins plu. 
Le rythme de lecture des élèves est bien reparti depuis la rencontre et en dépit de notre lycée-chantier-bourbier qui nous fait rentrer dans des salles algéco humides, très humides même, après les intempéries, forcément méditerranéennes, de la semaine.
Je partage les interrogations d’Agnès quant à L’Amant en culottes courtes que je viens de terminer et qui n’a aucun succès auprès de mes élèves.
Merci à Eric pour son courrier concernant Fils unique, sur lequel mes élèves de 1e L se sont jetés ( deux élèves l’ont achetés puisque ma classe Goncourt est une classe de seconde) après un cours où j’avais évoqué son existence comme fausse autobiographie. Le bouche à oreille a ensuite fait le reste. Comme j’ai programmé Don Juan et Les Liaisons  la question du libertinage au XVIIe et XVIIIe siècle est au coeur de mes préoccupations.
Je reviens au Goncourt pour évoquer aussi l’émission de Radio Bleue Roussillon à laquelle nous avons participé, trois des élèves de la classe, Mylène Reboul et moi. Ce devait être une émission interactive sur la lecture avec des questions d’auditeurs mais il semble que la tranche horaire (comme on dit dans le jargon radiophonique) de 9h-9h30,  ne soit guère favorable à la lecture car nous n’avons eu aucun appel téléphonique ! L’intérêt de l’entreprise n’en a pas moins été très grand, notamment en ce qui concerne l’expression orale et la capacité à répondre avec clarté sur les livres lus.
Le blog est reparti ( la fermeture du CDI avait un peu arrêté l’activité des élèves) et je vais dire à mes élèves d’aller regarder celui d’Amiens puisqu’il est ouvert !
 
 

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Zucchero et les autres : la bande son

Publié le par Eric Bertrand

En prévision de la rencontre avec Arlette, notre partenaire musique pour le spectacle, dès les premiers jours de la rentrée, je dois faire le point sur les musiques et Jennifer est en train d’évaluer sur quels morceaux elle va proposer une chorégraphie. Voici en tout cas la liste des titres retenus pour l’ensemble du spectacle : amateurs de canzone italiana, laissez-vous bercer !
 
-         Angelo Branduardi : « la demoiselle »
-         Paolo Conte : « Via con me »
-         Richard Cocciante : « Il mio rifugio »
-         Gianmaria Testa : « Gli amanti di Roma »
-         Adriano Celentano : « C’é sempre un motivo ».
-         Adriano Celentano : « Ancora vivo ».
-         Toto Cuttogno : « l’Italiano ».
-         Paolo Conte : « Sotto le stelle del jazz »
-         Zucchero : « Senza una donna ».
-         Dalida : « Gigi l’Amoroso »
-         Adriano Celentano : « la barca »
-         Gianmaria Testa : « Sono belle le cose »

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Un po di musica ...

 

Rubrique Goncourt :
 
Interview d’Amélie Nothomb. Rencontre du 11 octobre. (3)
 
 
Dans quel cadre écrivez-vous, ce qui vous inspire, à quel moment ?
 
D’abord j’écris absolument tous les jours, sans exception. D’environ 4h à environ 8h du matin, au saut du lit, juste au moment où je me réveille. La seule chose que je fais entre le moment où je me réveille et le moment où je commence à écrire, c’est que je bois d’un trait un demi litre de thé trop fort et que je m’habille énormément parce que ça donne froid d’écrire. Mais tout de suite je me mets à écrire, j’écris frénétiquement dans un état mental et physique extrêmes pendant plusieurs heures et après ça va. C’est comme si j’avais expulsé ce que j’avais besoin d’expulser pour être viable.
 
 
Que cela vous apporte-t-il d’écrire ?
 
C’est mystérieux comme question, mais en même temps c’est quand même singulier. Cela fait maintenant tellement d’années que j’écris et je sais que je pourrai pas vivre sans. Tous les matins au réveil, je me réveille dans la même angoisse, qui est un peu l’angoisse d’Urbain quand il se réveille et qu’il ne sait même plus qui il est. Je sais que tous les matins je dois tout reconstruire, donc ça recommence…Et en même temps, cela m’apporte de la jouissance. C’est très difficile d’écrire, mais je le fais dans un état de jouissance extrême et cela donne des sensations fortes et c’est vrai que je suis toujours à la recherche de sensations fortes.
 
 
A partir de quand avez-vous commencez à écrire ?
 
Avant l’âge de 17 ans, je n’ai pas écrit une seule ligne. Jamais je ne me le serais autorisée. J’ai été élevée dans un très grand culte de la littérature. Très grande lectrice, fille de très grands lecteurs, sœur de grande lectrice. Du coup la littérature pour moi était un temple. Ce qui ne m’incite pas du tout à écrire, au contraire, on se sent tout petit devant la littérature et on se dit : « jamais je ne serai assez grotesque pour aller me commettre dans ce temple ». Finalement, ce qui m’a autorisé à écrire, ça a été un livre de Rilke qui s’appelle Lettre à un jeune poète que j’ai lu justement à 17 ans et où la question de l’acte d’écrire y est posée de façon tellement différente de la façon dont je me le posais moi, (c'est-à-dire que moi je me disais « je n’écris pas parce que je suis indigne »), tandis que Rilke répond à la question d’une façon totalement différente, à savoir, la question n’est pas « suis-je un bon écrivain ? » (Parce que ça de toute façon, on en sait jamais rien), la seule question qu’on peut se poser c’est « est-ce que je peux continuer à vivre sans écrire ? Est-ce que écrire est pour moi une question de vie ou de mort ? ». Et je peux vous assurer qu’à cet âge là, ma condition de vivante n’était pas si sûre. J’ai vraiment compris que oui c’était une question de vie ou de mort. Donc je ne peux pas me poser la question de savoir si je pouvais me mesurer à Proust, puisque évidemment je ne le pouvais pas, Mais je pouvais écrire parce que c’était une question de vie ou de mort.
 
 
Vous éprouviez donc un certain mal-être ?
 
Un mal-être phénoménal, comme je crois on en éprouve souvent à vos âges…
 
 
Vous en êtes-vous servie pour écrire Antéchrista ?
 
Ca il est clair que Antéchrista est à 95 % autobiographique. J’ai eu ma Christa, qui ne s’appelait pas ainsi, mais j’ai été Blanche. Et alors, c’est très singulier parce que tout le monde m’a dit « Blanche, c’est moi, les vieux messieurs, les jeunes filles, les jeunes gens, les mères de famille... », mais personne ne m’a dit « ah ! Je me suis reconnue dans le personnage de Christa », donc moi je me dis « mais où se cache-t-elle ? » (rire
 
Question cinéma, aimez-vous les films en général ?
 
Je passe ma vie au cinéma. Ca a commencé pendant mon adolescence lorsque je suis arrivée en Europe, me sentant terriblement seule, j’y allais tous les jours voir absolument n’importe quoi et c’est d’ailleurs une attitude qui m’est restée. Même si je ne vais pas au cinéma tous les jours je suis du style à aller absolument tout voir : les films américains comme Superman et puis la troisième rétrospective du cinéma turkmène.
 
Et le dernier film en date ?
 
Un film chinois que j’ai vu vendredi dernier qui s’appelle « Voiture de luxe ». Formidable.
 
Et est-ce que tout cela vous a donné envie de travailler au cinéma ?
 
Vous savez cela ne s’improvise pas. On a vu beaucoup d’écrivains ces derniers temps s’imaginer qu’il suffit de prendre une caméra et de filmer, Bernard Henry Lévy par exemple, on a tous vu le grand chef d’œuvre que ça a donné. Je n’ai pas tellement envie de me ridiculiser, d’autre part ce que je fais comme écrivain occupe tellement de mon temps, j’ai une telle passion pour ça que je me dis : à chacun son métier. Vous savez moi je suis tellement comblée par ce que je fais… En plus je vois des gens aussi merveilleux qu’Alain Cornaud qui se tournent vers moi pour faire des films avec ce que je fais que je me dis :  « -raison de plus pour ne pas se couvrir de ridicule, laissons faire les spécialistes ».
 
Réaction de collègue :
Un grand merci de Nîmes à vous tous qui animez ces rencontres virtuelles mais ô combien réelles quand régulièrement je me connecte à la machine infernale.
Phil le bloggeur m’agace un tantinet moi aussi et les commentaires des internautes ne méritent pas vraiment le temps que l’on passe à les consulter, même s’il y a quelquefois d’heureuses surprises.
Nous sommes tous orientés vers le tiercé gagnant : pour ma part, j’ai demandé vendredi à mes élèves de répondre aux questions suivantes :
1)Quel est mon tiercé d’après les romans que j’ai lus ?
2)Ce tiercé est-il modifié par les remarques de mes camarades sur les romans que je n’ai pas encore lus ? Quel est le nouveau tiercé que je propose ?
3)Quel est mon tiercé des romans que j’élimine ?
Après dépouillement de ces votes :
Sont éliminés sans contestation aucune :
Quartier général du bruit et Supplément au roman national. Rien d’évident quant au 3°
Le tiercé gagnant est assez loin d’être net car les élèves comptent sur les dix jours de vacances pour poursuivre ce marathon et avant de se prononcer pour 3 romans, je ne peux que comptabiliser les 6 ouvrages qui retiennent leur faveur au 20 octobre :
Journal d’Hirondelle
Marilyn dernières séances
Nitoi ni moi
Ouest
Disparaître
Contours du jour qui vient 
Juste après, Un Pont d’oiseaux et L’amant en culottes courtes sont à égalité.  
Le succès de Journal est dû au fait qu’ils l’ont tous lu, que le roman est court et à même de séduire des élèves de seconde qui lisent peu en général.
Celui de Marilyn et Nitoi ni moi est en partie lié à l’effet des rencontres avec les auteurs, le 3 octobre à Marseille, mais en partie seulement car les élèves avaient déjà apprécié les ouvrages et ont été en fait confortés dans leur choix.
Antoine Audouard les avait charmés lors de la rencontre et ils ont été nombreux à emprunter le roman, mais le succès n’est pas vraiment au rendez-vous.
Personnellement je voterais pour Fils unique mais mes élèves le trouvent sans intérêt. Dommage… J’exploiterai tout de même certains passages en espérant qu’ils garderont quelques souvenirs pour l’année prochaine.
J’ai encore une question à vous poser à tous : comment procédez-vous pour choisir le délégué régional ?
La semaine dernière, j’ai demandé aux élèves d’indiquer par écrit s’ils souhaiteraient être délégué et d’argumenter leur réponse. Sur une classe de 32 élèves, 8 sont réellement intéressés et ceux qui ont répondu par la négative ont justifié leur position de façon sincère et même touchante. Et ce ce moment je me torture pour savoir comment désigner le délégué…
 

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La couverture et son quatrième

Publié le par Eric Bertrand

              Il manquait dans la présentation du travail autour de la pièce l’image de la couverture et de son quatrième. C’est réparé ! C’est encore l’exemplaire unique, l’éditeur n’ayant pas eu le temps de commencer l’étape de la distribution.
              De mon côté, j’attends un carton pour livrer un certain nombre de lecteurs. En priorité les comédiens qui doivent découvrir le volet narratif du Ponton de façon à mieux saisir leur rôle, leur personnage et l’ambiance sicilienne …

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Ecco "il Pontile" colla ceramica...

 

 

Rubrique Goncourt :
 
Interview d’Amélie Nothomb. Rencontre du 11 octobre. (2)
 
 
Vous en avez écrit un livre d’ailleurs...
 
J’en ai écrit un livre que je ne pensais pas écrire à ce moment là.
 
Livre qui est superbe pourtant !
 
Merci. Et cet à ce moment là donc que... mais ça c’est bien plus tard puisque j’avais 23 ans que je me suis dit bon maintenant tu as fait le tour de la question tu es rentrée au Japon tu as vu ça marche pas non plus. D’autre part tu écris tu le sais, depuis longtemps. Qu’est ce que tu risques à envoyer un manuscrit à un éditeur ? Tout ce que tu risques c’est être ridicule ; mais regarde tu es déjà ridicule. Mais regarde tu es Dame pipi dans une compagnie japonaise franchement... Est-ce que tu as déjà perdu la face il ne peut rien t’arriver de pire. Donc finalement j’avais raison, c’est bel et bien grâce au Japon mais d’une façon bien sûr, totalement paradoxale.
 
Mathilde : Donc le premier manuscrit que vous avez envoyé aux éditeurs c’était le récit de... ?  
 
Pas du tout ! « Stupeur et tremblements » est venu bien plus tard ! Le premier roman que j’ai écrit juste après et que envoyé aux éditeurs c’est le premier publié à savoir « Hygiène de l’assassin ». Vous savez à l’époque j’avais pas trop envie de me vanter de ce qui m’était arrivé au Japon. Je n’aurais jamais imaginé que j’en tirerais un roman, plus tard. Si j’ai pu, huit ans plus tard écrire sur ce sujet c’est parce que sans doute j’étais un écrivain avec son petit succès et que je me suis dit bon finalement la honte est passée maintenant je peux me risquer à parler de tout ça.
 
Et justement pour « Hygiène de l’assassin » on a beaucoup beaucoup aimé vraiment ce livre et on voulait savoir pour le personnage de Prétexta si vous vous étiez inspiré d’idées... de vos idées ou alors d’idées que vous trouviez autour de vous, de gens arrogants ?
 
C’est très gênant. Vous allez peut-être, être très choquée par ma réponse mais la vérité c’est que, vraiment je me suis inspirée de moi ! Bon comprenons nous bien quand j’ai écrit ce livre j’avais 23 ans je me suis dit  « t’es comme tout les écrivains, t’a envie de parler de ton nombril, or ton nombril n’a vraiment aucun intérêt. Comment me rendre intéressante, eh bien je vais me déguiser en mon contraire ! Je suis une femme, prenons un homme. Je suis jeune, prenons un vieillard. Je suis relativement aimable, prenons un être parfaitement odieux. Je ne suis absolument pas célèbre, prenons un prix Nobel de littérature. Moyennant ce déguisement, derrière lequel personne ne pourra me reconnaître je pourrai faire passer toutes mes idées parfois de façon un peu monstrueuse. Mais je peux dire que globalement j’endosse tout ce qu’il dit, sauf que je ne suis pas misogyne mais sans être misogyne le moins du monde il m’arrive d’être très irritée par certaines attitudes féminines ! Et je dirais que ma seule vraie différence avec Prétexta, c’est que je n’enlèverai aucune page à la Princesse de Clèves ! Je trouve que ce livre est parfait !
  
Avez-vous des livres préférés ?
 
Ma liste de mes livres préférés est infinie bien sur, il y a la princesse de Clèves, les Liaisons Dangereuses, le bal du comte d’Orgel, le Coup de grâce, le Pavillon d’or… la liste est très longue.
 
Quel est votre livre de chevet ?
 
Il y a un livre que je lis chaque année, et pourtant ce n’est pas celui que j’ai le plus relu de ma vie, mais chaque année je me lis le portrait de Dorian Grey. Il y a mille raisons aussi bien littéraires que psychologiques de relire ce livre.
 
Vous inspirez-vous de ces livres ?
 
Ce n’est pas si simple, je trouve que ce serait une très vilaine façon de rendre hommage à ces livres que de m’inspirer d’eux. D’autre part, il est certain que le fait de les avoir tellement lus, m’a influencée mais dans mon inconscient, ce n’est pas un acte volontaire. Je ne me dis pas « bon, faisons comme Oscar Wilde », (ce serait d’ailleurs du dernier ridicule de se prendre pour Oscar Wilde !). Je suis moi, mais avec toutes mes composantes c’est comme Prétexta dit : « on écrit aussi avec ce que l’on a mangé, mais dans ce que l’on a mangé il y a aussi bien la littérature que la nourriture », donc ça fait partie de moi.
 
A notre âge, aimiez-vous les cours de français ?
 
Je n’étais pas très bonne. Je n’avais pas de très bons points ni de très bons résultats ni en dissertation, ni en composition française. Mais bon, j’ai toujours aimé lire à côté de ça, donc je n’étais pas rétive au moment où il y avait les listes de lecture.
 
 
Réaction de collègue :
 
Avant de partir me mettre au vert j'apporte ma contribution à toutes les info. ou interrogations qui ont circulé sur le réseau  ces jours derniers. En ce qui concerne le rôle de la Fnac: à Perpignan, très positif. Toujours prêt, toujours partant, toujours accompagnant.Une aide  précieuse et efficace donc.
Le choix de mes élèves ( de seconde): difficile encore à déterminer; les vacances devraient être décisives. Début octobre les noms de Nothomb et de Poivre d'Arvor revenaient sans cesse, tandis que Boulin était violemment rejeté de même que Bataille, mais pas pour les mêmes raisons (toutefois quelques lecteurs avaient été sensibles à l'écriture de Bataille). Fleischer n'a pas été apprécié par ceux qui ont eu le courage de le lire. Litell, lu par a une poignée de courageux dès les premiers jours de septembre , a beaucoup plu, de  même qu'Audeguy. Depuis le 16 octobre, date de la rencontre avec trois des auteurs, tous se sont précipités sur Ouest, Contours du jour qui vient, Le bois des amoureux, qui à mon avis avaient été délaissés. Il n'y a plus qu'à attendre la rentrée!
En ce qui me concerne j'ai mon tiercé provisoire: Fils unique, Ouest et LesBienveillantes. Je n'ai  lu ni Schneider, ni Lapouge encore...
 
A tous les Grands et nobles profs du secondaire qui participent au Goncourt des lycéens, je souhaite des vacances méritées et bienfaisantes. Merci pour vos messages toujours lus avec plaisir et intérêt et à bientôt pour la dernière ligne droite !

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