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Boualem Sansal : 2084. La Fin du monde : dosette de lecture n°81 « Et si le ciel était vide… » (Alain Souchon)

Publié le par Eric Bertrand

Est-il possible de douter de la croyance ? Est-il envisageable pour un être libre et intelligent d’accepter tout ce que le monde qui l’entoure et en particulier sa religion lui imposent en vrac ? Du haut de son sanatorium, loin de l’endoctrinement qui règne dans le cercle dystopique d’Abistan, Ati, le héros de ce roman, est un esprit fort, un « mécréant ». Il ne fait pourtant rien de mal, mais il pense un peu trop souvent et il tend l’oreille sitôt qu’un pèlerin parle de « routes interdites » ou de « frontières ».

Car, en Abistan où seul existe le Dieu Yolah et son délégué Abi, le monde est stable, installé et sans limite et une véritable Police de la Pensée veille à l’ordre et au respect du dogme. Exactions, crimes, châtiments corporels, mise au pas des femmes, pèlerinages et mortifications diverses assurent l’équilibre de ce royaume de la Vérité absolue, décrétée depuis 2084, date de la dernière grande victoire de la Guerre sainte

En bon sceptique, alerté par les signes, Ati se pose des questions : « Ati désespérait de jamais comprendre comment le vice prolifère à proportion de la perfection du monde ». Ainsi, il lui devient évident que « la religion peut se bâtir sur le contraire de la vérité et devenir de ce fait la gardienne acharnée du mensonge originel. » D’où sortent en effet ces cohortes de marginaux qui vivent dans la misère et la honte ? Et puis, quel est donc cet univers dans lequel la langue unique imposée n’existe que parce qu’elle a éliminé les autres ? On dirait qu’elle est amputée de l’essentiel : « La langue sacrée ne parlait pas à l’esprit. Elle le désintégrait ».

Ati n’en finit pas de s’étonner et de s’émouvoir dans ce roman où tout tend à illustrer la thèse suivante, écrite en exergue : « la religion fait peut-être aimer Dieu mais rien n’est plus fort qu’elle pour faire détester l’homme et haïr l’humanité. »

Boualem Sansal : 2084. La Fin du monde : dosette de lecture n°81 « Et si le ciel était vide… » (Alain Souchon)

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Pour évoquer l'Ecosse et le travail de création

Publié le par Eric Bertrand

Pour évoquer l'Ecosse et le travail de création

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À la recherche du temps perdu : Marcel Proust Proust et le coffre-fort : dosette de lecture n°80

Publié le par Eric Bertrand

Comment faire revivre les épisodes du passé ? Beaucoup d’écrivains depuis Rousseau et Chateaubriand l’ont brillamment montré : l’écriture est capable d’enchanter les souvenirs. Dans ce domaine merveilleux de « la vraie vie », Proust ouvre son palais ! Sur l’immense ban de sable de la Mémoire, À la recherche du Temps perdu érige un sanctuaire, une sorte de Mont Saint-Michel scintillant.

             Sitôt qu’il s’est attablé devant sa tasse de thé, comme une lady sur une terrasse de Balbec, sitôt qu’il a commencé de grignoter sa précieuse madeleine, le narrateur de Du côté de chez Swann s’enfonce dans sa mer intérieure. Mais le goût fortuit de la madeleine ne comble pas le creux de son estomac à l’heure du tea time, il sollicite une autre force en lui : celle d’un courageux aventurier qui n’hésite plus à plonger... Et aussitôt, le présent morose s’évanouit. Exit ! Loin les petites cuillères à thé qui tintent, loin le confort suranné des salons, les mandibules de carpe des vieilles dames autour de lui qui mâchonnent et qui mastiquent et qui n’en ont rien à foutre !

             C’est une cité fabuleuse qui émerge peu à peu dans sa conscience, la pierre émeraude du Souvenir, polie par le travail de l’Ecriture... Les formes et les couleurs, les visages et les voix se recomposent, se cristallisent derrière la paroi de cet immense aquarium du temps perdu, parcouru à lents coups de palmes. Il faut considérer l’un des passages de À l’ombre des jeunes filles en fleurs comme la mise en abyme de toute la démarche du romancier. Je fais référence à l’extrait où les paysans et les pêcheurs de Balbec en quête de rêve et de spectacle incongru viennent défiler devant la baie vitrée du Grand Hôtel et assister au repas que sont en train de prendre les aristocrates et les bourgeois en vacances. Proust montre que le dîner derrière les vitres, du fait de son étrangeté et de son indécence s’offre au regard de « l’amateur d’ichtyologie humaine » à la manière d’un fascinant aquarium.

             Non invités à la fête, les malheureux spectateurs ouvrent des yeux hallucinés devant tant d’extravagance. Et le narrateur navigue entre les deux mondes, butte contre les parois comme s’il préparait un nouveau type de hold-up. Mais son « hold-up » à lui se situe à des profondeurs où la caméra de surveillance ne va pas. Au fond de l’abysse, c’est un coffre ancien qu’il perçoit, un vestige enfoui dont l’éclat le trouble. Alors il s’enfonce, il s’enfonce. Et puis soudain s’en empare et parvient à le remonter à la surface.

             Et le lecteur est son complice. Il était là qui attendait. Il trouvait le temps long, se morfondait, se rongeait les ongles, voyait passer toute sa vie en accéléré. Et enfin, c’est le signal ! Le coup de sifflet du Souvenir. Il se redresse, s’agite, ouvre en grand la cale du bateau et agrippe le butin que lui jette le narrateur affolé. Ça y est, il le sent glisser dans ses mains avides, il ne peut plus lui échapper, c’est un goût, une odeur, un son, un parfum, un contact : les espèces sonnantes et trébuchantes du Temps retrouvé.

À la recherche du temps perdu : Marcel Proust Proust et le coffre-fort : dosette de lecture n°80

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Les Vice-Rois de Gérard de Cortanze : dosette de lecture n°79 Les bolides à la porte du vieux château

Publié le par Eric Bertrand

Comment l’Histoire vient-elle marquer le destin d’une famille d’aristocrates depuis longtemps installée dans leur fief de Cortanze, à proximité de Turin ? Le roman commence en Italie au moment de la tentative d’unification du pays sur fond de menace autrichienne.

Tout jeune encore, dans les années 1880, le héros, Ercole Tommaso, lié par sa famille à la royauté piémontaise part en mission en Sardaigne où en qualité de vice-roi, il est chargé de rallier politiquement l’île rebelle à son pays.

Commence alors l’aventure humaine marquée par les tourments et les surprises de l’Histoire et de l’amour. Le temps passe, les mentalités évoluent, en France, en Italie. Peu à peu, la figure romanesque du père est remplacée par celle du fils, Roberto, attiré par la course automobile et les bolides. Avec sa famille, il quitte une Italie déchirée où se déchaîne un inquiétant nationalisme porté par les Chemises Noires de Mussolini et il se retrouve confronté aux haines et au racisme anti-italien d’abord à Marseille puis à Paris. Mais les circuits automobiles où s’alignent les Bugatti, Fiat et autres Ferrari continuent de le faire rêver et constituent un enjeu important pour son destin et celui des personnages qu’il côtoie.

Les Vice-Rois de Gérard de Cortanze : dosette de lecture n°79 Les bolides à la porte du vieux château

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Présentation de l'ensemble de mes livres

Publié le par Eric Bertrand

A travers l'interview par Thierry Tougeron et le média Entre nous culture, l'occasion de raconter l'aventure des livres depuis 1993...

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